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  • Descartes : Réussir sa vie sans philosopher?

    C'est proprement avoir les yeux fermés, sans tâcher jamais de les ouvrir, que de vivre sans philosopher ; et le plaisir de voir toutes les choses que notre vue découvre n'est point comparable à la satisfaction que donne la connaissance de celles qu'on trouve par la philosophie ; et, enfin, cette étude est plus nécessaire pour régler nos mœurs et nous conduire en cette vie, que n'est l'usage de nos yeux pour guider nos pas. Les bêtes brutes, qui n'ont que leur corps à conserver, s'occupent continuellement à chercher de quoi le nourrir ; mais les hommes, dont la principale partie est l'esprit, devraient employer leurs principaux soins à la recherche de la sagesse, qui en est la vraie nourriture ; et je m'assure aussi qu'il y en a plusieurs qui n'y manqueraient pas, s'ils avaient espérance d'y réussir, et qu'ils sussent combien ils en sont capables. Il n'y a point d'âme tant soit peu noble qui demeure si fort attachée aux objets des sens qu'elle ne s'en détourne quelquefois pour souhaiter quelque autre plus grand bien, nonobstant qu'elle ignore souvent en quoi il consiste. Ceux que la fortune favorise le plus, qui ont abondance de santé, d'honneurs, de richesses, ne sont pas plus exempts de ce désir que les autres ; au contraire, je me persuade que ce sont eux qui soupirent avec le plus d'ardeur après un autre bien, plus souverain que tous ceux qu'ils possèdent.

    René Descartes, Lettre-Préface à l'édition française des Principes de la philosophie (1644)

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  • Dominique A : "Le travail"

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  • Marx : Le travail, l'homme et la nature

    Le travail est de prime abord un acte qui se passe entre l'homme et la nature. L'homme y joue lui-même vis à vis de la nature le rôle d'une puissance naturelle. Les forces dont son corps est doué, bras et jambes, tête et mains, il les met en mouvement, afin de s'assimiler des matières en leur donnant une forme utile à sa vie. En même temps qu'il agit par ce mouvement sur la nature extérieure et la modifie, il modifie sa propre nature, et développe les facultés qui y sommeillent. Nous ne nous arrêterons pas à cet état primordial du travail où il n'a pas encore dépouillé son mode purement instinctif. Notre point de départ c'est le travail sous une forme qui appartient exclusivement à l'homme. Une araignée fait des opérations qui ressemblent à celles du tisserand, et l'abeille confond par la structure de ses cellules de cire l'habilité de plus d'un architecte. Mais ce qui distingue dès l'abord le plus mauvais architecte de l'abeille la plus experte, c'est qu'il a construit la cellule dans sa tête avant de la construire dans la ruche. Le résultat auquel le travail aboutit préexiste idéalement dans l'imagination du travailleur. Ce n'est pas qu'il opère seulement un changement de forme dans les matières naturelles ; il y réalise du même coup son propre but dont il a conscience, qui détermine comme loi son mode d'action, et auquel il doit subordonner sa volonté.

    Karl Marx, Le Capital (1867)

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  • Comte : Le travail positif

    Le travail positif, c'est-à-dire notre action réelle et utile sur le monde extérieur, constitue nécessairement la source initiale, d'ailleurs spontanée ou systématique, de toute richesse matérielle, tant publique que privée. Car, avant de pouvoir nous servir, tous les matériaux naturels exigent toujours quelque intervention artificielle, dût-elle se borner à les recueillir sur leur sol pour les transporter à leur destination. Mais, d'un autre côté, la richesse matérielle ne comporte une haute efficacité, surtout sociale, que d'après un degré de concentration ordinairement supérieur à celui qui peut jamais résulter de la simple accumulation des produits successifs du seul travail individuel. C'est pourquoi les capitaux ne sauraient assez grandir qu'autant: que, sous un mode quelconque de transmission, les trésors  obtenus par plusieurs travailleurs viennent se réunir chez un possesseur unique, qui préside ensuite à leur répartition effective, après les avoir suffisamment conservés.

    Auguste Comte, Système de politique positive (1851-1854)

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  • Hegel : Médiation et travail

    La médiation qui prépare et obtient pour le besoin particularisé un moyen également particularisé, c’est le travail. Par les procédés les plus variés, il spécifie la matière livrée immédiatement par la nature pour les différents buts. Cette élaboration donne au moyen sa valeur et son utilité. L’homme dans sa consommation rencontre surtout des productions humaines et ce sont des efforts humains qu’il utilise.

    Hegel, Principes de la Philosophie du Droit (1820)

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  • Hegel : "Le travail est désir réfréné, disparition retardée"

    Mais le sentiment de la puissance absolue, réalisé en général et réalisé dans les particularités du service, est seulement la dissolution en soi. Si la crainte du maître est le commencement de la sagesse, en cela la conscience est bien pour elle-même, mais elle n'est pas encore l'être-pour-soi ; mais c'est par la médiation du travail qu'elle vient à soi-même. Dans le moment qui correspond au désir dans la conscience du maître, ce qui paraît échoir à la conscience servante c'est le côté du rapport inessentiel à la chose, puisque la chose dans ce rapport maintient son indépendance. Le désir s'est réservé à lui-même la pure négation de l'objet, et ainsi le sentiment sans mélange de soi-même. Mais c'est justement pourquoi cette satisfaction est elle-même uniquement un état disparaissant, car il lui manque le côté objectif ou la subsistance. le travail, au contraire, est désir réfréné, disparition retardée : le travail forme. Le rapport négatif à l'objet devient forme de cet objet même, il devient quelque chose de permanent, puisque justement, à l'égard du travailleur, l'objet a une indépendance. Ce moyen négatif, ou l'opération formatrice, est en même temps la singularité ou le pur être-pour-soi de la conscience. Cet être-pour-soi, dans le travail, s'extériorise lui-même et passe dans l'élément de la permanence ; la conscience travaillante en vient ainsi à l'intuition de l'être indépendant, comme intuition de soi-même.

    Hegel, La Phénoménologie de l'esprit (1807)

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  • Balzac : La réussite

    Aujourd’hui, chez vous, le succès est la raison suprême de toutes les actions, quelles qu’elles soient. Le fait n’est donc plus rien en lui-même, il est tout entier dans l’idée que les autres s’en forment. De là, jeune homme, un second précepte : ayez de beaux dehors ! cachez l’envers de votre vie, et présentez un endroit très-brillant. La discrétion, cette devise des ambitieux, est celle de notre Ordre : faites-en la vôtre. Les grands commettent presque autant de lâchetés que les misérables ; mais ils les commettent dans l’ombre et font parade de leurs vertus : ils restent grands. Les petits déploient leurs vertus dans l’ombre, ils exposent leurs misères au grand jour : ils sont méprisés. Vous avez caché vos grandeurs et vous avez laissé voir vos plaies. Vous avez eu publiquement pour maîtresse une actrice, vous avez vécu chez elle, avec elle : vous n’étiez nullement répréhensible, chacun vous trouvait l’un et l’autre parfaitement libres ; mais vous rompiez en visière aux idées du monde et vous n’avez pas eu la considération que le monde accorde à ceux qui lui obéissent. Si vous aviez laissé Coralie à ce monsieur Camusot, si vous aviez caché vos relations avec elle, vous auriez épousé madame de Bargeton, vous seriez préfet d’Angoulême et marquis de Rubempré. Changez de conduite : mettez en dehors votre beauté, vos grâces, votre esprit, votre poésie. Si vous vous permettez de petites infamies, que ce soit entre quatre murs : dès lors vous ne serez plus coupable de faire tache sur les décorations de ce grand théâtre appelé le monde. Napoléon appelle cela : laver son linge sale en famille. Du second précepte découle ce corollaire : tout est dans la forme.

    Honoré de Balzac, Illusions perdues (1837-1843)

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  • Lafargue : Le droit à la paresse

    Sous l'Ancien Régime, les lois de l’Église garantissaient au travailleur 90 jours de repos (52 dimanches et 38 jours fériés) pendant lesquels il était strictement défendu de travailler. C'était le principal crime du catholicisme, la cause principale de l'irréligion de la bourgeoisie industrielle et commerçante. Sous la révolution, dès qu'elle fut maîtresse, elle abolit les jours fériés et remplaça la semaine de sept jours par celle de dix. Elle affranchit les ouvriers du joug de l’Église pour mieux les soumettre au joug du travail.

    Paul Lafargue, Le Droit à la paresse (1880)

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  • Gontcharov : Ce flemmard d'Oblomov

    512sXIumXqL._SX210_.jpg- Pourquoi n'êtes-vous pas gai ? dit-elle soudain.
    - Je ne sais pas, Olga Sergueïevna. Et puis pourquoi m'égayer ? Et comment ?
    - Occupez-vous, voyez davantage de gens.
    - M'occuper ! On peut s'occuper, bien sûr, mais quand on a un but. Or je n'en ai pas, vraiment pas.
    - Le seul but c'est de vivre.
    - Quand on ne sait pas pourquoi on vit, ont vit n'importe comment, au jour le jour ; on se réjouit de voir la nuit tomber et de pouvoir noyer dans le sommeil la question insidieuse des raisons pour lesquelles on a vécu, douze ou vingt-quatre heures durant ; et aussi cette autre question : pourquoi vivre le lendemain ?

    Ivan Gontcharov, Oblomov (1859)

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  • Montaigne : mon oisiveté

    Dernièrement je me retirai chez moi, décidé autant que je le pourrais à ne pas me mêler d’autre chose que de passer en repos, en m’isolant, ce peu qui me restait de vie : il me semblait que je ne pouvais faire à mon esprit une plus grande faveur que de le laisser en pleine oisiveté s’entretenir avec lui-même : j’espérais qu’il pouvait désormais le faire plus aisément, devenu avec le temps plus pondéré, plus mûr aussi.

    Montaigne, Sur l'oisiveté et autres essais en français moderne (XVIe s.)

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  • Sénèque : Éloge de l'oisiveté

    Or, ne songer qu'à obtenir encore, c'est oublier ce qu'on a obtenu ; et de tous les vices, la cupidité est le plus grand, c'est qu'elle est ingrate. Ajoutons que de tous ces hommes qui ont des fonctions dans l'Etat nul ne considère qui il surpasse, mais par qui il est surpassé ; ils sont moins flattés de laisser mille rivaux derrière eux que rongés d'en voir un seul qui les précède. C'est le vice de toute ambition de ne point regarder derrière elle. Et ce n'est pas l'ambition seule qui ne s'arrête jamais. Toute passion fait de même : elle part toujours du point d'arrivée.

    Sénèque, Éloge de l'oisiveté (Ier s. ap. JC)

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  • Kant : La paresse et la lâcheté

    La paresse et la lâcheté sont les causes qui font qu'un aussi grand nombre d'hommes préfèrent rester mineurs leur vie durant, longtemps après que la nature les a affranchis de toute direction étrangère (naturaliter majores) ; et ces mêmes causes font qu'il devient si facile à d'autres de se prétendre leurs tuteurs. Il est si aisé d'être mineur ! Avec un livre qui tient lieu d'entendement, un directeur de conscience qui me tient lieu de conscience, un médecin qui juge pour moi de mon régime, etc., je n'ai vraiment pas besoin de me donner moi-même de la peine. Il ne m'est pas nécessaire de penser, pourvu que je puisse payer ; d'autres se chargeront bien pour moi de cette ennuyeuse besogne. Les tuteurs, qui se sont très aimablement chargés d'exercer sur eux leur haute direction, ne manquent pas de faire que les hommes, de loin les plus nombreux (avec le beau sexe tout entier), tiennent pour très dangereux le pas vers la majorité, qui est déjà en lui-même pénible. Après avoir abêti leur bétail et avoir soigneusement pris garde de ne pas permettre à ces tranquilles créatures d'oser faire le moindre pas hors du chariot où ils les ont enfermées, ils leur montrent le danger qui les menace si elles essaient de marcher seules. 

    Emmanuel Kant

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  • Pourriol : Facile, L'art français de réussir sans forcer

    41Htf0a3k9L._SX195_.jpgL’intelligence, c’est la ruse : ne pas prendre la difficulté de face, inventer un chemin détourné, qui atteint mieux le but, sans effort, avec élégance. Ce livre propose d’entrer dans les secrets de cette facilité à la française, et d’apprendre à la pratiquer, en nous promenant dans les domaines les plus variés, du sport à l’art, en passant par la gastronomie ou l’amour. Nous croiserons des philosophes comme Descartes ou Deleuze, des écrivains comme Stendhal ou Françoise Sagan, des artistes comme la pianiste Hélène Grimaud ou le cuisinier Alain Passard. Mais aussi des athlètes : Yannick Noah, Zinedine Zidane, l’apnéiste Jacques Mayol ou le funambule Philippe Petit. Enfin Cyrano de Bergerac ou Valmont… tous lancés à la poursuite de cet idéal français qui consiste, dans un subtil équilibre, à savoir suivre sa pente sans jamais tomber dans la facilité.
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    Ollivier Pourriol, Facile, L'art français de réussir sans forcer (2018)

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  • "Qu'est-ce qu'une vie réussie ?" (La philosophie au comptoir)

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  • Pourriol : L'art de réussir sans effort

    Ce que je fais sans effort, tout me conduit à penser que c'est facile en soi, que n'importe qui devrait être capable de le faire. Ça s'appelle l'illusion de l'expert...

    Il y a aussi, à l'inverse, l'illusion du débutant, quand je crois, parce que ça a l'air facile pour d'autres, que ça va être facile pour moi... En général, on s'en aperçoit assez vite : l'illusion du débutant ne survit pas à l'épreuve de la réalité.

    Mais il y a tout de même la chance du débutant : la chance de celui qui réussit du premier coup quelque chose de difficile, précisément parce qu'il ne sait pas encore que c'est difficile.

    Ollivier Pourriol, Facile, L'art français de réussir sans forcer (2018)

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  • Nietzsche : L'activité du génie

    L'activité du génie ne paraît pas le moins du monde quelque chose de foncièrement différent de l'activité de l'inventeur en mécanique, du savant astronome ou historien, du maître en tactique. Toutes ces activités s'expliquent si l'on se représente des hommes dont la pensée est active dans une direction unique, qui utilisent tout comme matière première, qui ne cessent d'observer diligemment leur vie intérieure et celle d'autrui, qui ne se lassent pas de combiner leurs moyens. Le génie ne fait rien que d'apprendre d'abord à poser des pierres, ensuite à bâtir, que de chercher toujours des matériaux et de travailler toujours à y mettre la forme. Toute activité de l'homme est compliquée à miracle, non pas seulement celle du génie mais aucune n'est un "miracle."

    D'où vient donc cette croyance qu'il n'y a de génie que chez l'artiste, l'orateur et le philosophe ? Qu'eux seuls ont une "intuition" ? (Mot par lequel on leur attribue une sorte de lorgnette merveilleuse avec laquelle ils voient directement dans "l'être" !) Les hommes ne parlent intentionnellement de génie que là où les effets de la grande intelligence leur sont le plus agréables et où ils ne veulent pas d'autre part éprouver d'envie. Nommer quelqu'un « divin », c'est dire : "ici nous n'avons pas à rivaliser." En outre tout ce qui est fini, parfait, excite l'étonnement, tout ce qui est en train de se faire est déprécié. Or personne ne peut voir dans l'œuvre de l'artiste comment elle s'est faite ; c'est son avantage, car partout où l'on peut assister à la formation, on est un peu refroidi. L'art achevé de l'expression écarte toute idée de devenir, il s'impose tyranniquement comme perfection actuelle. Voilà pourquoi ce sont surtout les artistes de l'expression qui passent pour géniaux, et non les hommes de science. En réalité cette appréciation et cette dépréciation ne sont qu'un enfantillage de la raison.

    Friedrich Nietzsche, Humain trop humain (1878)

     

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  • Isaacson : Steve Jobs

    bm_11518_aj_m_6562.jpgJobs n'était pas un inventeur au sens strict , mais un maître pour mêler idées , art et technologie et ainsi "inventer" le futur. Il avait conçu le Mac parce qu'il avait compris le potentiel des interfaces graphiques -ce que Xerox avait été incapable de faire - et il avait créé l'IPod parce qu'il avait envie d'avoir mille chansons dans sa poche -ce que Sony , malgré tous ses atouts et son héritage , n'avait pu accomplir. Certains entrepreneurs innovent parce qu'ils ont une vision globale , d'autres parce qu'ils maîtrisent les détails. Jobs faisait les deux sans discontinuer. Résultat : il lança une série de produits durant ces trois dernières années qui ont révolutionné des industries entières.

    Walter Isaacson, Steve Jobs (2011)

     

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  • Sénèque : "Il y a loin du vrai repos à l'apathie"

    Il y a loin du vrai repos à l'apathie. Pour moi, du vivant de Vatia, je ne passais jamais devant sa demeure sans me dire : "Ci-gît Vatia." Mais tel est ô Lucilius, le caractère vénérable et saint de la philosophie, qu'au moindre trait qui la rappelle le faux-semblant nous séduit. Car dans l'oisif le vulgaire voit un homme retiré de tout, libre de crainte, qui se suffit et vit pour lui-même, tous privilèges qui ne sont réservés qu'au sage. C'est le sage qui, sans ombre de sollicitude, sait vivre pour lui ; car il possède la première des sciences de la vie. Mais fuir les affaires et les hommes parce nos prétentions échouées nous ont décidées à la retraite, ou que nous n'avons pu souffrir de voir le bonheur des autres ; mais, de même qu'un animal timide et sans énergie se cache par peur, c'est vivre, non pour soi, mais de la plus honteuse vie : pour son ventre, pour le sommeil, pour la luxure. Il ne s'ensuit pas qu'on vive pour soi de ce qu'on ne vit pour personne. Au reste, c'est une si belle chose d'être constant et ferme dans ses résolutions, que même la persévérance dans le rien faire nous impose.

    Sénèque, Lettres à Lucilius (Ier s. ap. JC)

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  • Marsan : Éloge de la paresse

    I

    La belle Lendore s’est mariée. Si belle et gentille, véritablement princière, elle a épousé, avec sa maigre dot, un homme sans fortune.

    Une certaine paresse, une certaine inaction peuvent résulter, dans les jeunes années d’une surabondance de forces spirituelles, où l’embarras est de choisir. Ces forces morales et poétiques dont l’être plie supposent qu’il a beaucoup de générosité, et beaucoup de courage. Ainsi la belle Lendore. Pour suivre son coeur, elle n’a pas même hésité. Adieu les songes ! Adieu, loisirs ! Elle travaille à présent, comme des milliers de ses soeurs, barbares que nous sommes. Elle enseigne. Avec un sourire encore surpris que le monde ne soit pas tout entier une idylle. Elle assure que la paresse de son adolescence lui a beaucoup appris.

    II

    Chênedollé nous rapporte un grand nombre des plus étincelants propos de Rivarol. Il se flattait de n’être pas ingrat, et cependant il n’est pas pur de toute jalousie. Rivarol le jetait dans un enivrement. Il ne pensait d’abord qu’à Rivarol. Le charme rompu, il n’a pas su se priver d’un peu griffer son dieu.

    Ils ont parlé de Voltaire, de Thomas, de Buffon. C’est ce que Rivarol disait de ce dernier qui nous intéresse. Il était difficile, contenté par la seule perfection. « Le portrait du cheval, disait Rivarol, a du mouvement, de l’éclat, de la rapidité, du fracas ; celui du chien vaut peut-être mieux encore, mais il est trop long… » Quant à l’aigle, il est manqué. Manqué aussi, le paon… Qu’il fût de Buffon ou de Guéneau, n’importe, c’était une description à refaire (Guéneau était le nègre de Buffon). Elle était trop longue et pourtant incomplète, elle manquait de cette verve intérieure qui anime tout, et de cette brièveté pittoresque qui double l’éclat des images en les resserrant. « J’ai dans la tête, - concluait Rivarol, - un paon bien autrement neuf, bien autrement magnifique, et je ne demanderai pas une heure pour mieux faire. »

    Mais cette heure, il ne l’a jamais eue, elle s’envola toujours. Son scrupule, son entrain, sa folle confiance, ses feux d’artifice : il a tout gaspillé. Jusqu’à ce qu’il fût trop tard, éternellement.

    Ami, prends garde aux heures. Chacune d’elles est unique. Telle est la morale de cette histoire, moins immorale que tu ne l’attendais peut-être.

    Eugène Marsan, Éloge de la paresse (1926)

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  • Gilles Vervisch : Peut-on réussir sans effort ni aucun talent

    Le geek suprême, Steve Jobs l'a écrit : " Je suis convaincu que la moitié qui sépare les entrepreneurs qui réussissent de ceux qui échouent est purement la persévérance. " Une manière de dire que la réussite serait une question de volonté : quand on veut, on peut ! Les gens qui réussissent le doivent à leur travail et à leurs efforts, et les gens qui échouent considérés comme des ratés, n'auraient tout simplement aucune volonté. Dans la vie, tout ne serait donc qu'une affaire de mérite personnel.

    Dans ce texte vivifiant, Gilles Vervisch décortique la croyance dans le mérite omniprésente à notre époque. Certes, elle peut s'avérer être un moteur pour entreprendre. La " méritocratie " assurant une égalité des chances pour permettre aux plus méritants de s'en sortir semble tout à fait juste.

    Mais cette croyance dans le mérite n'est-elle pas aussi illusoire que dangereuse ? Qu'est-ce que réussir sa vie ? Une vie réussie est-elle forcément celle d'un startuppeur ? Est-il bien vrai que la vie ne nous offre que ce que nous méritons ?
    En définitive, la croyance dans le mérite permet surtout de culpabiliser " ceux qui ne sont rien ", et de tranquilliser ceux qui ont réussi, souvent privilégiés, convaincus qu'ils n'ont de compte à personne.

    Un essai décapant et facétieux, à rebours des poncifs de la pensée dominante sur la méritocratie.

    Gilles Vervisch, Peut-on réussir sans effort ni aucun talent ?, éd. Le Passeur, 2019

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  • Rousseau : L’homme est naturellement paresseux

    Il est inconcevable à quel point l’homme est naturellement paresseux. On dirait qu’il ne vit que pour dormir, végéter, rester immobile; à peine peut-il se résoudre à se donner les mouvements nécessaires pour s’empêcher de mourir de faim. Rien ne maintient tant les sauvages dans l’amour de leur état que cette délicieuse indolence. Les passions qui rendent l’homme inquiet, prévoyant, actif, ne naissent que dans la société. Ne rien faire est la première et la plus forte passion de l’homme après celle de se conserver. Si l’on y regardait bien, l’on verrait que, même parmi nous, c’est pour parvenir au repos que chacun travaille: c’est encore la paresse qui nous rend laborieux.

    Jean-Jacques Rousseau, Essai sur l’origine des langues (1781)

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  • "Le travail c'est la santé"

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  • Aristote : Le vrai loisir, la contemplation et le bonheur

    S"il il est vrai que le bonheur est l'activité conforme à la vertu, il est de toute évidence que c'est celle qui est conforme à la vertu la plus parfaite, c'est-à-dire de la partie de l'homme la plus haute. Qu'il s'agisse de l'esprit ou de toute autre faculté, à quoi semblent appartenir de nature l'empire, le commandement, la notion de ce qui est bien et divin ; que cette faculté soit divine elle aussi ou ce qu'il y a en nous de divin, c'est bien l'activité de cette partie de nous-mêmes, activité conforme à sa vertu propre, qui constitue le bonheur parfait. Or nous avons dit qu'elle est contemplative.

    Cette proposition s'accorde, semble-t-il, tant avec nos développements antérieurs qu'avec la vérité. Car cette activité est par elle-même la plus élevée; de ce qui est en nous, l'esprit occupe la première place; et, parmi ce qui relève de la connaissance, les questions qu'embrasse l'esprit sont les plus hautes.

    Ajoutons aussi que son action est la plus continue; il nous est possible de nous livrer à la contemplation d'une façon plus suivie qu'à une forme de l'action pratique.

    Et, puisque nous croyons que le plaisir doit être associé au bonheur, la plus agréable de toutes les activités conformes à la vertu se trouve être, d'un commun accord, celle qui est conforme à la sagesse. Il semble donc que la sagesse, elle au moins, comporte des plaisirs merveilleux autant par leur pureté que par leur solidité, et il est de toute évidence que la vie pour ceux qui savent se révèle plus agréable que pour ceux qui cherchent encore à savoir.

    D'ailleurs l'indépendance dont nous avons fait mention caractérise tout particulièrement la vie contemplative. Certes, le sage, le juste, comme tous les autres hommes, ont besoin de ce qui est indispensable à la vie; et même, si munis qu'ils soient d'une façon suffisante de ces biens extérieurs, il leur faut encore autre chose: le juste a besoin de gens à l'endroit de qui et avec qui il pourra manifester son sens de la justice; il en va de même de l'homme tempérant et de l'homme courageux et de tous les autres représentants des vertus morales; mais le sage, même abandonné à lui seul, peut encore se livrer à la contemplation et plus sa sagesse est grande, mieux il s'y consacre. Sans doute le ferait-il d'une façon supérieure encore, s'il associait d'autres personnes à sa contemplation ; quoi qu'il en soit, il est à un suprême degré l'homme qui ne relève que de lui-même.

    En outre, cette existence est la seule qu'on puisse aimer pour elle-même : elle n'a pas d'autre résultat que la contemplation, tandis que, par l'existence pratique, en dehors même de l'action, nous aboutissons toujours à un résultat plus ou moins important.

    Ajoutons encore que le bonheur parfait consiste également dans le loisir. Nous ne nous privons de loisirs qu'en vue d'en obtenir, et c'est pour vivre en paix que nous faisons la guerre...

    Une telle existence, toutefois, pourrait être au-dessus de la condition humaine. L'homme ne vit plus alors en tant qu'homme, mais en tant qu'il possède quelque caractère divin ; et, autant ce caractère divin l'emporte sur ce qui est composé, autant cette activité excellera par rapport à celle qui résulte de toutes les autres vertus. Si donc, l'esprit, par rapport à l'homme, est un attribut divin, une existence conforme à l'esprit sera, par rapport à la vie humaine, véritablement divine. Il ne faut donc pas écouter les gens qui nous conseillent, sous prétexte que nous sommes des hommes, de ne songer qu'aux choses humaines et, sous prétexte que nous sommes mortels, de renoncer aux choses immortelles. Mais, dans la mesure du possible, nous devons nous rendre immortels et tout faire pour vivre conformément à la partie la plus excellente de nous-mêmes, car le principe divin, si faible qu'il soit par ses dimensions, l'emporte, et de beaucoup, sur toute autre chose par sa puissance et sa valeur.

    Aristote, Éthique à Nicomaque (IVe s. av. JC)

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  • Moore : Travail, loisirs et oisiveté

    "Chacun est libre d'occuper à sa guise les heures comprises entre le travail, le sommeil et les repas, non pour les gâcher dans les excès et la paresse, mais afin que tous, libérés de leur métier, puissent s'adonner à quelque bonne occupation de leur choix. La plupart consacrent ces heures de loisir à l'étude. Chaque jour en effet des leçons accessibles à tous ont lieu avant le début du jour, obligatoires pour ceux-là seulement qui ont été personnellement destinés aux lettres. Mais, venus de toutes les professions, hommes et femmes y affluent librement, chacun choisissant la branche d'enseignement qui convient le mieux à sa forme d'esprit. Si quelqu'un préfère consacrer ces heures libres, de surcroît, à son métier, comme c'est le cas pour beaucoup d'hommes qui ne sont tentés par aucune science, par aucune spéculation, on ne l'en détourne pas. Bien au contraire, on le félicite de son zèle à servir l'État.

    Après le repas du soir, on passe une heure à jouer, l'été dans les jardins, l'hiver dans les salles communes qui servent aussi de réfectoire on y fait de la musique, on se distrait en causant. Les Utopiens ignorent complètement les dés et tous les jeux de ce genre, absurdes et dangereux. Mais ils pratiquent deux divertissements qui ne sont pas sans ressembler avec les échecs. L'un est une bataille de nombres où la somme la plus élevée est victorieuse ; dans l'autre, les vices et les vertus s'affrontent en ordre de bataille.[... ]
    Arrivés à ce point il nous faut, pour nous épargner une erreur, considérer attentivement une objection. Si chacun ne travaille que six heures, penserez-vous, ne risque-t-on pas inévitablement de voir une pénurie d'objets de première nécessité ?

    Bien loin de là, il arrive souvent que cette courte journée de travail produise non seulement en abondance, mais même en excès, tout ce qui est indispensable à l'entretien et au confort de la vie. Vous me comprendrez aisément si vous voulez bien penser à l'importante fraction de la population qui reste inactive chez les autres peuples, la presque totalité des femmes d'abord, la moitié de l'humanité; ou bien, là où les femmes travaillent, ce sont les hommes qui ronflent à leur place. Ajoutez à cela la troupe des prêtres et de ceux qu'on appelle les religieux, combien nombreuse et combien oisive ! Ajoutez-y tous les riches, et surtout les propriétaires terriens, ceux qu'on appelle les nobles. Ajoutez-y leur valetaille[1], cette lie de faquins[2] en armes et les mendiants robustes et bien portants qui inventent une infirmité pour couvrir leur paresse. Et vous trouverez, bien moins nombreux que vous ne l'aviez cru, ceux dont le travail procure ce dont les hommes ont besoin.

    Demandez-vous maintenant combien il y en a parmi eux dont l'activité a une fin véritablement utile. Nous évaluons toutes choses en argent, ce qui nous amène à pratiquer quantité d'industries totalement inutiles et superflues, qui sont simplement au service du luxe et du plaisir. Cette multitude des ouvriers d'aujourd'hui, si elle était répartie entre les quelques branches qui utilisent vraiment les produits de la nature pour le bien de tous, elle créerait de tels surplus que l'avilissement des prix empêcherait les ouvriers de gagner leur vie. Mais que l'on affecte à un travail utile tous ceux qui ne produisent que des objets superflus et, en plus, toute cette masse qui s'engourdit dans l'oisiveté et la fainéantise, gens qui gaspillent chaque jour, du travail des autres, le double de ce que le producteur lui-même consomme pour son propre compte : vous verrez alors combien il faut peu de temps pour produire en quantité nécessaire les choses indispensables ou simplement utiles, sans même négliger ce qui peut contribuer au plaisir, pourvu que celui-ci soit sain et naturel."

    Thomas More, L'Utopie (1516)

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  • Kierkegaard : L'oisiveté est-elle la mère de tous les maux?

    On a l'habitude de dire que l'oisiveté est la mère de tous les maux. On recommande le travail pour empêcher le mal. Mais aussi bien la cause redoutée que le moyen recommandé vous convaincront facilement que toute cette réflexion est d'origine plébéienne.

    L'oisiveté, en tant qu'oisiveté, n'est nullement la mère de tous les maux, au contraire, c'est une vie vraiment divine lorsqu'elle ne s'accompagne pas d'ennui. Elle peut faire, il est vrai, qu'on perde sa fortune, etc. ; toutefois, une nature patricienne ne craint pas ces choses, mais bien de s'ennuyer. Les dieux de l'Olympe ne s'ennuyaient pas, ils vivaient heureux en une oisiveté heureuse. Une beauté féminine qui ne coud pas, ne file pas, ne repasse pas, ne lit pas et ne fait pas de musique est heureuse dans son oisiveté ; car elle ne s'ennuie pas. L'oisiveté donc, loin d'être la mère du mal, est plutôt le vrai bien. L'ennui est la mère de tous les vices, c'est lui qui doit être tenu à l'écart. L'oisiveté n'est pas le mal et on peut dire que quiconque ne le sent pas prouve, par cela même, qu'il ne s'est pas élevé jusqu'aux humanités. Il existe une activité intarissable qui exclut l'homme du monde spirituel et le met au rang des animaux qui, instinctivement, doivent toujours être en mouvement. Il y a des gens qui possèdent le don extraordinaire de transformer tout en affaire, dont toute la vie est affaire, qui tombent amoureux et se marient, écoutent une facétie et admirent un tour d'adresse, et tout avec le même zèle affairé qu'ils portent à leur travail de bureau.

    Søren Kierkegaard

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