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  • Delacourt, La liste de mes envies

    CVT_cvt_La-liste-de-mes-envies_1724.pngNos besoins sont nos petits rêves quotidiens. Ce sont nos petites choses à faire, qui nous projettent à demain, à après-demain, dans le futur ; ces petits riens qu'on achètera la semaine prochaine et qui nous permettent de penser que la semaine prochaine, on sera toujours vivants.

    Grégoire Delacourt, La liste de mes envies (2012)

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  • Kant : Construire son édifice grâce à la raison

    Une partie de ces connaissances [a priori], les connaissances mathématiques, sont depuis longtemps en possession de la certitude, et font espérer le même succès pour les autres, quoique celles-ci soient peut-être d'une nature toute différente. En outre, dès qu'on a mis le pied hors du cercle de l'expérience, on est sûr de ne plus être contredit par elle. Le plaisir d'étendre ses connaissances est si grand que l'on ne pourrait être arrêté dans sa marche que par une évidente contradiction, contre laquelle on viendrait se heurter. Or il est aisé d'éviter cette pierre d'achoppement, pour peu que l'on se montre avisé dans ses fictions, qui n'en restent pas moins des fictions. L'éclatant exemple des mathématiques nous montre jusqu'où nous pouvons aller dans la connaissance a priori sans le secours de l'expérience. Il est vrai qu'elles ne s'occupent que d'objets et de connaissances qui peuvent être représentés dans l'intuition ; mais on néglige aisément cette circonstance, puisque l'intuition dont il s'agit ici peut être elle-même donnée a priori, et que, par conséquent, elle se distingue à peine d'un simple et pur concept. Entraînés par cet exemple de la puissance de la raison, notre penchant à étendre nos connaissances ne connaît plus de bornes. La colombe légère, qui, dans son libre vol, fend l'air dont elle sent la résistance, pourrait s'imaginer qu'elle volerait bien mieux encore dans le vide. C'est ainsi que Platon, quittant le monde sensible, qui renferme l'intelligence dans de si étroites limites, se hasarda, sur les ailes des idées, dans les espaces vides de l'entendement pur. Il ne s'apercevait pas que, malgré tous ses efforts, il ne faisait aucun chemin, parce qu'il n'avait pas de point d'appui où il pût appliquer ses forces pour changer l'entendement de place. C'est le sort commun de la raison humaine dans la spéculation, de commencer par construire son édifice en toute hâte, et de ne songer que plus tard à s'assurer si les fondements en sont solides.

    Emmanuel Kant, Critique de la raison pure (1781)

    Photo : Pexels

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  • "Aimer à perdre la raison"

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  • Hume : Former notre raisonnement

    Dans toutes les sciences démonstratives, les règles sont certaines et infaillibles, mais lorsque nous les appliquons, nos facultés incertaines et faillibles sont fortement sujettes à s'en écarter et à tomber dans l'erreur. Il nous faut, par conséquent, former, pour chacun de nos raisonnements, un nouveau jugement pour vérifier ou contrôler notre croyance ou jugement premier ; notre vision doit s'élargir jusqu'à inclure une sorte d'historique de tous les cas où notre entendement nos a trompés, comparés à ceux où son témoignage était juste et vrai. Nous pouvons donc considérer notre jugement comme une sorte de cause, dont la vérité est l'effet naturel, mais un effet tel qu'il peut fréquemment être empêché par l'irruption d'autres causes ainsi que par l'inconstance des pouvoirs de notre esprit. La conséquence en est que toute connaissance dégénère en probabilité, et cette probabilité est plus ou moins grande suivant l'expérience que nous avons de la véracité ou du caractère trompeur de notre entendement, et aussi selon la simplicité ou la complexité de la question.

    David Hume, Traité de la nature humaine (1740)

    Photo : Pexels - Ruslan Rozanov

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  • Kant : La raison humaine

    La raison humaine a cette destinée singulière, dans un genre de ses connaissances, d'être accablée de questions qu'elle ne saurait éviter, car elles lui sont imposées par sa nature même, mais auxquelles elle ne peut répondre, parce qu'elles dépassent totalement le pouvoir de la raison humaine.

    Ce n'est pas sa faute si elle tombe dans cet embarras. Elle part de principes dont l'usage est inévitable dans le cours de l'expérience et en même temps suffisamment garanti par cette expérience. Aidée par eux, elle monte toujours plus haut (comme du reste le comporte sa nature), vers des conditions plus éloignées. Mais s'apercevant que, de cette manière, son œuvre doit toujours rester inachevée, puisque les questions n'ont jamais de fin, elle se voit dans la nécessité d'avoir recours à des principes qui dépassent tout usage possible dans l'expérience et paraissent néanmoins si dignes de confiance qu'ils sont même d'accord avec le sens commun. De ce fait, elle se précipite dans une telle obscurité et dans de telles contradictions qu'elle peut en conclure qu'elle doit quelque part s'être appuyée sur des erreurs cachées, sans toutefois pouvoir les découvrir, parce que les principes dont elle se sert, dépassant les limites de toute expérience, ne reconnaissent plus aucune pierre de touche de l'expérience. Le terrain [Kampfplatz] où se livrent ces combats sans fin se nomme la Métaphysique.

    Emmanuel Kant, Critique de la raison pure (1781)

    Photo : Pexels

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  • "Raisons et sentiments"

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  • Austen : "Raisons et sentiments"

    Jane-Austen-Raison-et-sentiments.jpgJe me suis souvent surprise moi-même à faire ce genre d'erreur, dit Elinor, à me méprendre sur quelque aspect d'un caractère; on s'imagine que les gens sont plus gais ou plus graves, plus ingénieux, plus stupides qu'ils ne le sont en réalité, et il est difficile de dire comment et en quoi l'erreur a pris naissance. Parfois, on se fonde sur ce qu'ils disent eux-même et, plus fréquemment, sur ce qu'en disent les autres, sans se donner à soi-même le loisir de réfléchir et de juger.

    Jane et Austen, Raisons et sentiments (1811)

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  • "Être ou ne pas être"

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  • "Je retourne ma veste"

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  • Spinoza : Scepticisme

    Si, par la suite, quelque sceptique se trouvait dans le doute à l’égard de la première vérité elle-même et de toutes celles que nous déduirons, selon la norme, de cette première vérité, c’est, ou bien qu’il parlera contre sa conscience, ou bien nous avouerons qu’il y a des hommes dont l’esprit est complètement aveugle, qu’il le soit de naissance ou que les préjugés, c’est-à-dire quelque accident extérieur, l’aient rendu tel. En effet ils n’ont même pas conscience d’eux-mêmes : s’ils affirment quelque chose ou doutent de quelque chose, ils ne savent pas qu’ils affirment ou qu’ils doutent ; ils disent qu’ils ne savent rien, et cela même qu’ils ne savent rien, ils déclarent l’ignorer ; encore ne le disent-ils pas sans restriction, car ils craignent de s’avouer existants, alors qu’ils ne savent rien, si bien qu’il leur faut enfin garder le silence pour être sûrs de ne rien admettre qui ait senteur de vérité. . Il faut, en définitive, s’abstenir de parler de sciences avec eux (car pour ce qui concerne l’usage de la vie et de la société, la nécessité les oblige à admettre leur propre existence, à chercher ce qui leur est utile, à affirmer et à nier sous serment bien des choses). Leur prouve-t-on quelque chose, en effet, ils ne savent si l’argumentation est probante ou défectueuse. S’ils nient, concèdent, ou opposent une objection, ils ne savent qu’ils nient, concèdent, ou opposent une objection ; il faut donc les considérer comme des automates entièrement privés de pensée.

    Baruch Spinoza, Traité de la réforme de l’entendement (1677)

    Photo : Pexels - Pavel Danilyuk

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  • Kant : Suspendre notre jugement

    Réserver ou suspendre notre jugement, cela consiste à décider de ne pas permettre à un jugement provisoire de devenir définitif. Un jugement provisoire est un jugement par lequel je me représente qu’il y a plus de raison pour la vérité d’une chose que contre sa vérité, mais que cependant ces raisons ne suffisent pas encore pour que je porte un jugement déterminant ou définitif par lequel je décide franchement de sa vérité. Le jugement provisoire est donc un jugement dont on a conscience qu’il est simplement problématique. On peut suspendre le jugement à deux fins : soit en vue de chercher les raisons du jugement définitif, soit en vue de ne jamais juger. Dans le premier cas la suspension du jugement s’appelle critique (…) ; dans le second elle est sceptique (…). Car le sceptique renonce à tout jugement, le vrai philosophe au contraire suspend simplement le sien tant qu’il n’a pas de raisons suffisantes de tenir quelque chose pour vrai.

    Emmanuel Kant, Logique (1800)

    Photo : Pexels - Ron Lach

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  • Bernheim et Storch : "Pourquoi les imbéciles ne changent pas d'avis ?"

    téléchargement.jpgNous avions deux interrogations :
    – Pourquoi est-ce si difficile de changer d’avis ? Et nous pensions à la boutade d’Einstein qui disait "Il est plus facile de désintégrer un atome qu’un préjugé".
    – Comment faire changer d’avis ? Et là, nous pensions à l’aphorisme d’Oscar Wilde : "Je déteste les discussions car elles vous font parfois changer d’avis".

    Yves Bernheim et Laurent Storch, Pourquoi les imbéciles ne changent pas d'avis ? (2019)

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  • Foucault : "Loupé" !

    On est perdu dans sa vie, dans ce qu'on écrit, dans un film que l'on fait lorsque, précisément, on veut s'interroger sur la nature de l'identité de quelque chose. Alors là, c'est "loupé", car on entre dans les classifications. Le problème, c'est de créer justement quelque chose qui se passe entre les idées et auquel il faut faire en sorte qu'il soit impossible de donner un nom et c'est donc, à chaque instant, d'essayer de lui donner une coloration, une forme et une intensité qui ne dit jamais ce qu'elle est. C'est ça l'art de vivre ! L'art de vivre, c'est de tuer la psychologie, de créer avec soi-même et avec les autres des individualités, des êtres, des relations, des qualités qui soient innomées.

    Michel Foucault

    Photo : Pexels - Anastasia Shuraeva

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  • "On peut douter de tout..."

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  • Wittgenstein : Certitudes (3)

    337 - On ne peut pas procéder à des expérimentations s'il n'y a pas nombre de choses qu'on ne met pas en doute. Mais cela ne veut pas dire que l'on admet certaines présuppositions de confiance. Si je poste une lettre que j'ai écrite, je tiens qu'elle va arriver, je m'y attends.

    Lorsque je procède à une expérimentation, je ne doute pas de l'existence de l'appareillage que j'ai sous les yeux; j'ai une masse de doutes, mais non celui-là. Lorsque je fais un calcul, je crois, sans en douter, que les chiffres qui sont sur le papier ne vont pas permuter d'eux-mêmes, je me fie tout au long à ma mémoire, et je m'y fie de façon inconditionnelle. La certitude qui joue ici est la même que celle de n'avoir jamais été sur la Lune.

    338 - Imaginons-nous cependant des gens qui ne seraient pas tout à fait sûrs de ces choses mais qui diraient qu'il en va ainsi très vraisemblablement et que cela ne vaut pas la peine d'en douter. Dans ma situation, ils diraient donc : « Il est hautement invraisemblable que j'aie jamais été sur la Lune, etc. » En quoi la vie de ces gens serait-elle différente de la nôtre ? Des gens disent – il y en a – que, si l'on pose une casserole d'eau sur le feu, il n'est que hautement probable qu'elle se mette à bouillir et non à geler, et donc qu'à strictement parler, ce que nous considérons comme impossible n'est qu'improbable. Quelle différence est-ce que cela fait dans leur vie ? N'est-ce pas seulement qu'ils en disent plus sur certaines choses que nous autres ?

    339 - Imagine-toi un homme qui doit aller chercher un ami à la gare et qui ne se contente pas de consulter l'horaire et de partir à une certaine heure pour la gare, mais qui dise : "Je ne crois pas que le train va vraiment arriver, je vais pourtant aller à la gare." Il fait tout ce que l'on fait habituellement, mais assortit ce qu'il fait de doute contre soi-même, etc.

    340 - La certitude avec laquelle nous croyons n'importe quelle proposition mathématique est la même que celle que nous avons quand nous savons comment il faut prononcer les lettres A et B, comment s'appelle la couleur de notre sang et quand nous savons que les autres ont du sang qu'ils appellent "sang".

    341 - C'est-à-dire : les questions que nous posons et nos doutes reposent sur ceci : certaines propositions sont soustraites au doute, comme des gonds sur lesquels tournent ces questions et doutes.

    342 - C'est-à-dire : il est inhérent à la logique de nos investigations scientifiques qu'effectivement certaines choses ne soient pas mises en doute.

    343 - Mais ce n'est pas que nous ne puissions pas nous livrer à une investigation sur tout, bien forcés ainsi de nous contenter de présuppositions. Non. Si je veux que la porte tourne, il faut que les gonds soient fixes.

    Ludwig Wittgenstein, De la certitude (1951)

    Photo : Pexels - Mizuno K 

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  • Wittgenstein : Certitudes (2)

    115. Qui voudrait douter de tout n'irait même pas jusqu'au doute. Le jeu du doute lui-même présuppose la certitude".

    253. À la base de la croyance fondée, il y a la croyance qui n'est pas fondée".

    337. On ne peut pas procéder à des expérimentations s'il n'y a pas nombre de choses qu'on ne met pas en doute. Mais cela ne veut pas dire que l'on admet certaines présuppositions de confiance. Si je poste une lettre que j'ai écrite, je tiens qu'elle va arriver, je m'y attends.

    Lorsque je procède à une expérimentation, je ne doute pas de l'existence de l'appareillage que j'ai sous les yeux ; j'ai une masse de doutes, mais non celui-là. Lorsque je fais un calcul, je crois sans en douter, que les chiffres qui sont sur le papier ne vont pas permuter d'eux-mêmes, je me fie tout au long à ma mémoire, et je m'y fie de façon inconditionnelle. La certitude qui joue ici est la même que celle de n'être jamais allé sur la lune...

    341. Les questions que nous posons et nos doutes reposent sur ceci : certaines propositions sont soustraites au doute, comme des gonds sur lesquels tournent ces questions et doutes".

    342. […] il est inhérent à la logique de nos investigations scientifiques qu'effectivement certaines choses ne soient pas mises en doute".

    Ludwig Wittgenstein, De la certitude (1951)

    Photo : Pexels - Mart Production

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  • Wittgenstein : Certitudes (1)

    93. Les propositions qui représentent ce que Moore « sait » sont toutes d'un genre tel que l'on peut difficilement se représenter pourquoi quelqu'un irait croire le contraire. Par exemple, la proposition selon laquelle Moore a vécu à proximité immédiate de la terre. – Là encore je peux parler de moi-même au lieu de Moore. […] Rien dans mon image du monde ne parle pour une vue contraire.

    94. Mais cette image du monde, je ne l'ai pas parce que je me suis convaincu de sa rectitude ; ni non plus parce que  je  suis  convaincu  de  sa  rectitude.  Non, elle est l'arrière-plan dont j'ai hérité sur le fond duquel je distingue entre vrai et faux.

    95. Les propositions qui décrivent cette image du monde pourraient appartenir à une sorte de mythologie. Et leur rôle est semblable à celui des règles du jeu ; et ce jeu, on peut aussi l'apprendre de façon purement pratique, sans règles explicites.

    96. On pourrait se représenter certaines propositions, empiriques de forme, comme solidifiées et fonctionnant tels des conduits pour les propositions empiriques fluides, non solidifiées ; et que cette relation se modifierait avec le temps, des propositions fluides se solidifiant et des propositions durcies se liquéfiant.

    97.  La  mythologie  peut  se  trouver  à  nouveau  prise dans le courant, le lit où coulent les pensées peut se déplacer. Mais je distingue entre le flux de l'eau dans le lit de la rivière et le déplacement de ce dernier ; bien qu'il n'y ait pas entre les deux une division tranchée.

    98. Mais si on venait nous dire : « La logique est donc elle aussi une science empirique », on aurait tort. Ce qui est juste, c'est ceci : la même proposition peut être traitée à un moment comme ce qui est à vérifier par l'expérience, à un autre moment comme une règle de la vérification.

    99. Et même le bord de cette rivière est fait en partie d'un roc solide qui n'est sujet à aucune modification ou sinon à une modification imperceptible, et il est fait en partie d'un sable que le flot entraîne puis dépose ici et là.

    Ludwig Wittgenstein, De la certitude (1954)

    Photo : Pexels - Julia Filirovska

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  • Tocqueville : 'L'homme et sa vérité"

    Si l'homme était forcé de se prouver à lui-même toutes les vérités dont il se sert chaque jour, il n'en finirait point ; il s'épuiserait en démonstrations préliminaires sans avancer ; comme il n'a pas le temps, à cause du court espace de la vie, ni la faculté, à cause des bornes de son esprit, d'en agir ainsi, il en est réduit à tenir pour assurés une foule de faits et d'opinions qu'il n'a eu ni le loisir ni le pouvoir d'examiner et de vérifier par lui-même, mais que de plus habiles ont trouvés ou que la foule adopte. C'est sur ce premier fondement qu'il élève lui-même l'édifice de ses propres pensées. Ce n'est pas sa volonté qui l'amène à procéder de cette manière ; la loi inflexible de sa condition l'y contraint.

    Il n'y a pas de si grand philosophe dans le monde qui ne croie un million de choses sur la foi d'autrui, et qui ne suppose beaucoup plus de vérités qu'il n'en établit.

    Ceci est non seulement nécessaire, mais désirable. Un homme qui entreprendrait d'examiner tout par lui-même ne pourrait accorder que peu de temps et d'attention à chaque chose ; ce travail tiendrait son esprit dans une agitation perpétuelle qui l'empêcherait de pénétrer profondément dans aucune vérité et de se fixer avec solidité dans aucune certitude. Son intelligence serait tout à la fois indépendante et débile. Il faut donc que, parmi les divers objets des opinions humaines, il fasse un choix et qu'il adopte beaucoup de croyances sans les discuter, afin d'en mieux approfondir un petit nombre dont il s'est réservé l'examen.

    Il est vrai que tout homme qui reçoit une opinion sur la parole d'autrui met son esprit en esclavage ; mais c'est une servitude salutaire qui permet de faire un bon usage de la liberté.

    Il faut donc toujours, quoiqu'il arrive, que l'autorité se rencontre quelque part dans le monde intellectuel et moral. Sa place est variable, mais elle a nécessairement une place.

    Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1840)

    Photo : Pexels - Leeloo The First

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  • Condillac : "Douter si deux et deux font quatre"

    Descartes a eu raison de penser que, pour arriver à des connaissances certaines, il fallait commencer par rejeter toutes celles que nous croyons avoir acquises : mais il s'est trompé, lorsqu'il a cru qu'il suffisait pour cela de les révoquer en doute. Douter si deux et deux font quatre, si l'homme est un animal raisonnable, c'est avoir des idées de deux, de quatre, d'homme, d'animal, et de raisonnable. Le doute laisse donc subsister les idées telles qu'elles sont ; ainsi, nos erreurs venant de ce que nos idées ont été mal faites, il ne les saurait prévenir. Il peut pendant un temps nous faire suspendre nos jugements : mais enfin nous ne sortirons d'incertitude, qu'en consultant les idées qu'il n'a pas détruites ; et, par conséquent, si elles sont vagues, et mal déterminées, elles nous égareront comme auparavant. Le doute de Descartes est donc inutile. Chacun peut éprouver par lui-même qu'il est encore impraticable : car si l'on compare des idées familières et bien déterminées, il n'est pas possible de douter des rapports qui sont entre elles. Telles sont, par exemple, celles des nombres. Si ce philosophe n'avait pas été prévenu pour les idées innées, il aurait vu que l'unique moyen de se faire un nouveau fonds de connaissances, était de détruire les idées mêmes, pour les reprendre à leur origine, c'est-à-dire, aux sensations.

    Étienne Bonnot de Condillac, Essais sur l'origine des connaissances humaines (1746)

    Photo : Pexels - Cottonbro Studio

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  • Platon : Douter et être sage

    Je suis plus sage que cet homme. Il peut bien se faire que ni lui ni moi ne sachions rien de fort merveilleux ; mais il y a cette différence que lui, il croit savoir, quoiqu’il ne sache rien ; et que moi, si je ne sais rien, je ne crois pas non plus savoir. Il me semble donc qu’en cela du moins je suis un peu plus sage, que je ne crois pas savoir ce que je ne sais point.

    Platon, Apologie de Socrate (Ve s. av JC)

    Photo : Pexels - Ron Lach

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  • Marmion : D'où viennent les cons ?

    L'explosion démographique provoquera à son tour trois conneries supplémentaires : le travail, la guerre, les chefs. Le travail, car les humains passèrent ainsi des trois ou quatre heures qu'utilisaient les chasseurs-cueilleurs à chasser, pêcher et cueillir, à la journée continue des agriculteurs, mais tout autant celle des ouvriers de l'industrie et, désormais, des employés de bureau du secteur dit tertiaire, que nous sommes presque tous devenus. C'est pourquoi l'ethnologue Marshall Sahlins avait remarqué dès les années 1960 que, si nous définissons l'abondance comme un rapport coût/profit entre l'énergie dépensée et le résultat, les seules sociétés d'abondance furent celles des chasseurs-cueilleurs.

    Jean-François Marmion, Histoire universelle de la connerie (2019)

    Photo : Pexels - Ike louie Natividad

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  • Rovere : "Les cons s'obstinent"

    Pour résumer la permanence insurmontable de cette force, on conviendra donc de ceci : les cons s’obstinent. Cette particularité a l’inconvénient de couper court aux solutions les plus simples. Car l’obstination des cons signifie qu’il n’y a aucun sens à plaider la tolérance face à l’intolérance, l’esprit éclairé face à la superstition, l’ouverture d’esprit face aux préjugés, etc. Les grandes déclarations et les bons sentiments ne servent qu’à faire plaisir à celui ou à celle qui parlent, et ce plaisir est encore une manière pour la connerie d’absorber son adversaire, de le reprendre dans ses filets et d’entraver, encore et toujours, son effort pour comprendre.

    Maxime Rovere, Que faire des cons ? (2019)

    Photo : Pexels - Inga Seliverstova

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  • Dard : "Traitez-moi de con pendant que vous y êtes !"

    Les-Con-eo.jpgMais pour qui me prenez-vous, policier ? Je suis un Con, moi, camarade monsieur. Un vrai. Me laisser conduire parmi la tourbe des assurés sociaux ? Me laisser tripoter par des mains d'individus qui, il n'y a pas si longtemps, s'en servaient pour marcher ! Moi, descendant en ligne droite de Con 1er, premier roi des Con ! Traitez-moi de con pendant que vous y êtes !

    Frédéric Dard, Les con (1973)

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  • Descartes : "Je suppose donc que toutes les choses que je vois sont fausses..."

    Je suppose donc que toutes les choses que je vois sont fausses ; je me persuade que rien n'a jamais été de tout ce que ma mémoire remplie de mensonges me représente ; je pense n'avoir aucun sens ; je crois que le corps, la figure, l'étendue, le mouvement et le lieu ne sont que des fictions de mon esprita. Qu'est-ce donc qui pourra être estimé véritable ? Peut-être rien autre chose, sinon qu'il n'y a rien au monde de certain.

    Mais que sais-je s'il n'y a point quelque autre chose différente de celles que je viens de juger incertaines, de laquelle on ne puisse avoir le moindre doute ? N'y a-t-il point quelque Dieu, ou quelque autre puissance, qui me met en l'esprit ces pensées ? Cela n'est pas nécessaire ; car peut-être que je suis capable de les produire de moi-même. Moi donc à tout le moins ne suis-je pas quelque chose ? Mais j'ai déjà nié que j'eusse aucun sens ni aucun corps. J'hésite néanmoins, car que s'ensuit-il de là ? Suis-je tellement dépendant du corps et des sens, que je ne puisse être sans eux ? Mais je me suis persuadé qu'il n'y avait rien du tout dans le monde, qu'il n'y avait aucun ciel, aucune terre, aucun esprit, ni aucun corps ; ne me suis-je donc pas aussi persuadé que je n'étais point ? Non certes, j'étais sans doute, si je me suis persuadé, ou seulement si j'ai pensé quelque chose. Mais il y a un je ne sais quel trompeur très puissant et très ruséb, qui emploie toute son industrie à me tromper toujours. Il n'y a donc point de doute que je suis, s'il me trompe ; et qu'il me trompe tant qu'il voudra il ne saurait jamais faire que je ne sois rien, tant que je penserai être quelque chose. De sorte qu'après y avoir bien pensé, et avoir soigneusement examiné toutes choses, enfin il faut conclure, et tenir pour constant que cette proposition : Je suis, j'existe, est nécessairement vraie, toutes les fois que je la prononce, ou que je la conçois en mon esprit.

    Mais je ne connais pas encore assez clairement ce que je suis, moi qui suis certain que je suis ; de sorte que désormais il faut que je prenne soigneusement garde de ne prendre pas imprudemment quelque autre chose pour moi, et ainsi de ne me point méprendre dans cette connaissance, que je soutiens être plus certaine et plus évidente que toutes celles que j'ai eues auparavant.

    René Descartes, Méditations métaphysiques (1641)

    Photo : Pexels - Liza Summer

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  • Lehane : "Chacun a le droit de penser ce qu'il veut ?"

    — Chacun a le droit de penser ce qu’il veut.
    Le visage du directeur s’assombrit.
    — Faux. Les hommes sont des imbéciles. Ils mangent, ils boivent, ils libèrent des gaz, ils forniquent et ils procréent – ce qui est d’ailleurs tout à fait regrettable, car le monde serait un endroit bien plus supportable si nous étions moins nombreux. Des retardés, des bâtards, des cinglés et des individus sans moralité – voilà ce que nous produisons. La souillure que nous répandons sur cette terre.

    Dennis Lehane, Shutter Island (2003)

    Photo : Pexels - Brett Sayles

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  • Meredith : Cons anglais et cons français

    Il y a à peu près autant d'imbéciles en Angleterre qu'en France. Mais un imbécile anglais est un imbécile tout court, tandis qu'un imbécile français est un imbécile qui raisonne.

    George Meredith

    Photo : Pexels - Andrea Piacquadio

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  • Smith : "Changer d'avis"

    CVT_C_Changer-davis_1574.pngÀ plus d'un titre l'écriture est l'acte qui consiste à dire Je, de dominer l'autre, l'interpeller : Écoutez-moi, voyez les choses à ma manière, changez d'avis, c'est un acte agressif voire hostile. Vous pouvez masquer cette agressivité autant que vous voulez à coups de propositions subordonnées, de qualificatifs ou de subjonctifs timorés, d'ellipse et de circonvolution -- en laissant croire à une suggestion plutôt qu'à une affirmation, à une allusion plutôt qu'à un énoncé -- mais on ne peut ignorer le fait que coucher des mots sur le papier relève d'une tactique d'intimidation, c'est une invasion, une manière d'empiéter sur l'espace le plus intime du lecteur en lui imposant la sensibilité de l'écrivain.

    Zadie Smith, Changer d'avis (2013)

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