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Documents - Page 25

  • Voltaire : "Rien n’était si beau, si leste, si brillant, si bien ordonné que les deux armées"

    Rien n’était si beau, si leste, si brillant, si bien ordonné que les deux armées. Les trompettes, les fifres, les hautbois, les tambours, les canons, formaient une harmonie telle qu’il n’y en eut jamais en enfer. Les canons renversèrent d’abord à peu près six mille hommes de chaque côté ; ensuite la mousqueterie ôta du meilleur des mondes environ neuf à dix mille coquins qui en infectaient la surface. La baïonnette fut aussi la raison suffisante de la mort de quelques milliers d’hommes. Le tout pouvait bien se monter à une trentaine de mille âmes. Candide, qui tremblait comme un philosophe, se cacha du mieux qu’il put pendant cette boucherie héroïque. 

    Enfin, tandis que les deux rois faisaient chanter des Te Deum1 chacun dans son camp, il prit le parti d'aller raisonner ailleurs des effets et des causes. Il passa par-dessus des tas de morts et de mourants, et gagna d'abord un village voisin ; il était en cendres : c'était un village abare que les Bulgares avaient brûlé, selon les lois du droit public. Ici des vieillards criblés de coups regardaient mourir leurs femmes égorgées, qui tenaient leurs enfants à leurs mamelles sanglantes ; là des filles éventrées après avoir assouvi les besoins naturels de quelques héros rendaient les derniers soupirs ; d'autres, à demi brûlées, criaient qu'on achevât de leur donner la mort. Des cervelles étaient répandues sur la terre à côté de bras et de jambes coupés.

    Candide s'enfuit au plus vite dans un autre village : il appartenait à des Bulgares, et des héros abares l'avaient traité de même. Candide, toujours marchant sur des membres palpitants ou à travers des ruines, arriva enfin hors du théâtre de la guerre, portant quelques petites provisions dans son bissac, et n'oubliant jamais Mlle Cunégonde.

    Voltaire, Candide (1759)

    Photo : Pexels

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  • Sun Tzu, L'Art de la guerre

    Sun Tzu dit : La guerre est d’une importance vitale pour l’État. C’est le domaine de la vie et de la mort : la conservation ou la perte de l’empire en dépendent ; il est impérieux de bien le régler. Ne pas faire de sérieuses réflexions sur ce qui le concerne, c’est faire preuve d’une coupable indifférence pour la conservation ou pour la perte de ce qu’on a de plus cher, et c’est ce qu’on ne doit pas trouver parmi nous.

    Cinq choses principales doivent faire l’objet de nos continuelles méditations et de tous nos soins, comme le font ces grands artistes qui, lorsqu’ils entreprennent quelque chef-d’œuvre, ont toujours présent à l’esprit le but qu’ils se proposent, mettent à profit tout ce qu’ils voient, tout ce qu’ils entendent, ne négligent rien pour acquérir de nouvelles connaissances et tous les secours qui peuvent les conduire heureusement à leur fin.

    Si nous voulons que la gloire et les succès accompagnent nos armes, nous ne devons jamais perdre de vue : la doctrine, le temps, l’espace, le commandement, la discipline.

    Sun Tzu, L'Art de la guerre (VIe s. av. JC)

     

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  • Clausewitz : La guerre est la politique par d'autres moyens

    La guerre n'est rien d'autre qu'un duel amplifié. Si nous voulons saisir comme une unité l'infinité des duels particuliers dont elle se compose, représentons-nous deux combattants : chacun cherche, en employant sa force physique, à ce que l'autre exécute sa volonté ; son but immédiat est de terrasser l'adversaire et de le rendre ainsi incapable de toute résistance.

    La guerre est un acte de violence engagé pour contraindre l'adversaire à se soumettre à notre volonté.

    Pour affronter la violence, la violence s'arme des inventions des arts et des sciences. Elle se fixe elle-même, sous le nom de lois du droit naturel, des restrictions imperceptibles, à peine notables, qui l'accompagnent sans affaiblir fondamentalement sa force. La violence, c'est-à-dire la violence physique (car il n'en existe pas de morale en dehors des notions d'État et de loi), est donc le moyen. Imposer notre volonté à l'ennemi en constitue la fin. Pour atteindre cette fin avec certitude nous devons désarmer l'ennemi. Lui ôter tout moyen de se défendre est, par définition, le véritable objectif de l'action militaire. Il remplace la fin et l'écarte en quelque sorte comme n'appartenant pas à la guerre elle-même.

    Ainsi les âmes philanthropiques pourraient-elles facilement s'imaginer qu'il existe une manière artificielle de désarmer ou de terrasser l'adversaire sans causer trop de blessures, et que c'est là la véritable tendance de l'art de la guerre. Il faut pourtant dissiper cette erreur, aussi belle soit-elle. Car, dans une entreprise aussi dangereuse que la guerre, les erreurs engendrées par la bonté sont précisément les pires. Puisque l'utilisation de  la violence physique dans toute son ampleur n'exclut en aucune manière la coopération de l'intelligence, celui qui se sert de cette violence avec brutalité, sans épargner le sang, l'emportera forcément sur l'adversaire qui n'agit pas de  même. Il dicte par là sa loi à l'autre. Tous deux se poussent ainsi mutuellement jusqu'à une extrémité qui ne connaît d'autre limite que le contrepoids exercé par l'adversaire.

    C'est ainsi qu'il faut envisager les choses, et c'est un effort vain, absurde même, que d'écarter la nature de l'élément brutal en raison de la répugnance qu'il inspire.

    Si les guerres des peuples cultivés sont bien moins cruelles et destructrices que celles des peuples incultes, cela tient à la situation sociale de ces États, aussi bien entre eux que chacun d'entre eux. La guerre résulte de cette situation et des conditions qu'elle impose : celle-ci la détermine, la limite et la modère. Mais ces aspects ne font pas essentiellement partie de la guerre, ils n'en sont que les données. Il est donc impossible d'introduire  dans la philosophie de  la guerre un principe de modération sans commettre une absurdité.

    Le combat entre les hommes se compose en réalité de deux éléments distincts : le sentiment hostile et l'intention hostile. Nous avons choisi le dernier de ces deux éléments comme caractéristique de notre définition car il est le plus général. Même l'emportement de haine le plus sauvage, le plus proche de l'instinct, n'est pas concevable sans intention hostile. En revanche, la plupart des intentions hostiles ne sont jamais, ou rarement, dominées par l'hostilité  des sentiments. Chez les peuples sauvages prédominent les intentions appartenant au domaine du cœur, chez les peuples civilisés, celles qui relèvent de l'entendement. Cette différence ne tient cependant pas à la sauvagerie et à la civilisation en elles-mêmes, mais aux circonstances concomitantes, aux institutions, etc. Elle n'est donc pas nécessairement présente dans chaque cas particulier, mais elle l'emporte dans la majorité d'entre eux. En un mot, même les peuples les plus civilisés peuvent se déchaîner l'un contre l'autre, enflammés par la haine.

    On voit par là combien il serait faux de ramener la guerre entre les nations civilisées uniquement à un acte rationnel de leurs gouvernements, et d'imaginer qu'elle se libère toujours davantage des passions : au point d'en arriver à se passer des masses physiques des forces armées au profit de leurs seuls rapports théoriques, en une sorte d'algèbre de l'action.
      La théorie commençait à s'engager dans cette direction lorsque les événements des dernières guerres en montrèrent une meilleure. Si la guerre est un acte de violence, la passion en fait aussi nécessairement partie. Si la guerre n'en procède pas, elle y ramène pourtant plus ou moins. Et ce plus ou moins ne dépend pas du degré de culture, mais de l'importance et de la durée des intérêts antagonistes.

    Lorsque nous voyons que les peuples civilisés ne mettent pas leurs prisonniers à mort et ne ravagent pas villes et campagnes, cela est dû à la place croissante que prend l'intelligence dans leur conduite de la guerre. Elle leur a appris un emploi de la violence plus efficace que cette manifestation sauvage de l'instinct.

    L'invention de la poudre, le développement continu des armes à feu montrent suffisamment qu'en progressant la civilisation n'a absolument pas entravé ou détourné la tendance sur laquelle le concept de la guerre, celle d'anéantir l'ennemi.

    Nous réitérons notre thèse : la guerre est un acte de violence, et l'emploi de celle-ci ne connaît pas de limites. Chacun des adversaires impose sa loi à l'autre. Il en résulte une interaction qui, selon la nature de son concept, doit forcément conduire aux extrêmes.

    Clausewitz, De la guerre (1832)

    Photo : Pixabay - Pexels

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  • Vuillard : Les plus grandes catastrophes s'annoncent souvent à petits pas

    Enfin, au bout d'un long couloir de discussions, haussant ses lourdes épaules, fatigué, dégoûté sans doute, le vieux Miklas, vers minuit, tandis que les nazis se sont déjà emparés des principaux centres de pouvoir, que Seyss-Inquart refuse toujours obstinément de parapher son télégramme, que dans la ville de Vienne se poursuivent des scènes de folie, émeutiers assassins, incendies, hurlements, Juifs traînés par les cheveux dans des rues jonchées de débris, alors que les grandes démocraties semblent ne rien voir, que l'Angleterre s'est couchée et ronronne paisiblement, que la France fait de beaux rêves, que tout le monde s'en fout, le vieux Miklas, à contrecœur, finit de par nommer le nazi Seyss-Inquart, Chancelier d'Autriche. Les plus grandes catastrophes s'annoncent souvent à petits pas.

    Eric Vuillard, L'ordre du Jour (2017)

     

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  • Céline : La guerre, cette apocalypse

    Le colonel, c’était donc un monstre ! À présent, j’en étais assuré, pire qu’un chien, il n’imaginait pas son trépas ! Je conçus en même temps qu’il devait y en avoir beaucoup des comme lui dans notre armée, des braves, et puis tout autant sans doute dans l’armée d’en face. Qui savait combien ? Un, deux, plusieurs millions peut-être en tout ? Dès lors ma frousse devint panique. Avec des êtres semblables, cette imbécillité infernale pouvait continuer indéfiniment... Pourquoi s’arrêteraient-ils ? Jamais je n’avais senti plus implacable la sentence des hommes et des choses.

    Serais-je donc le seul lâche sur la terre ? pensais-je. Et avec quel effroi !... Perdu parmi deux millions de fous héroïques et déchaînés et armés jusqu’aux cheveux ? Avec casques, sans casques, sans chevaux, sur motos, hurlants, en autos, sifflants, tirailleurs, comploteurs, volants, à genoux, creusant, se défilant, caracolant dans les sentiers, pétaradant, enfermés sur la terre, comme dans un cabanon, pour y tout détruire, Allemagne, France et Continents, tout ce qui respire, détruire, plus enragés que les chiens, adorant leur rage (ce que les chiens ne font pas), cent, mille fois plus enragés que mille chiens et tellement plus vicieux ! Nous étions jolis ! Décidément, je le concevais, je m’étais embarqué dans une croisade apocalyptique.

    Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932)

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  • Ariana Vafadari, "Anahita"

    Il y a au moins deux manières de parler d’Anahita, l’album de la musicienne franco-iranienne Ariana Vafadari.

    La première est de parler du texte tiré de L’Avesta, issu de la tradition sacrée de Zarathoustra, vieille de près de 3700 ans : "Anahita rêve du temps où son village était vert. Le ventre d’Anahita est vide et sec comme les arbres desséchés du village. Anahita parcourt le monde en errance dans les déserts et les terres en feu. Désespérée, Anahita prie la grande déesse tutélaire dont elle porte le nom, la déesse des eaux et de la fécondité célébrée dans cette prière zoroastrienne. Elle prie à nouveau dans une incantation aux Eaux Divines. Après avoir répondu aux tourments d’Anahita, la déesse prend vie en elle. Cette incantation apaise la jeune femme qui sera dès lors plus sereine. Anahita se met en marche vers la source sacrée au confins du désert. Anahita arrive devant la Montagne de Nikbânou en Iran, la montagne s’ouvre sur une grotte, la source apparaît : « L’eau est là ! »"

    L’autre manière est de s’arrêter sur les 10 morceaux de cet album peu commun, en ce qu’il mêle récits millénaires, musique actuelle et une voix de mezzo-soprano unique, avec un savant mélange de pop, de musique traditionnel, de jazz, de classique et de contemporain : une vraie passerelle entre cultures occidentales, orientales et persanes. Tout au long de l'album, la chanteuse est accompagnée de Julien Carton au piano et aux arrangements, de Driss El Maloumi à l'ud, de Leïla Soldevila à la basse, et d'Habib Meftah Boushehri aux percussions.

    Ce qui nous fait dire qu’Anahita n’a pas la facture d’un simple album de world music est le parti-pris de la musicienne de servir les textes de l’Avesta, une compilation de textes sacrés zoroastriens, et de mettre en musique les paroles de Zarathoustra. Un parti-pris intellectuel et mystique autant qu’artistique, si l’on pense au dépouillement extrême de certains morceaux ("Anahita", "Le chant de l’eau"), ou au contraire aux arabesques instrumentales du titre "Sur les pas", capable de mêler modernité et traditions classiques.

    L’album aux sons polyphoniques nous transporte des siècles plus tôt, dans un pays de conteurs, de légendes et de fillettes au cœur pur ("Le rêve d’Anahita", "Anahita"). La musicienne choisit la retenue et les sons traditionnels pour raconter un voyage initiatique qui n’est pas sans résonance contemporaine sur notre environnement ("L’arbre"). Outre le piano ("Âtash", "Sur les pas"), Ariana Vafadari fait le choix d’instruments traditionnels (ud, percussions) pour cet opus résolument intemporel. Pour le morceau "Tchak Tchak", Ariana Vafadari a invité le percussionniste Habib Meftah Boushehri dans un morceau envoûtant qui narre celui de l’arrivée au but de l’aventure initiatique : "l’eau".

    En fermant les yeux, l’auditeur se laissera happer par la mélancolie et l’onirisme de "Rôyâ" d’"Ardvi Sura" et d’"Incantation" : "zénitude" garantie, même si l’artiste aurait très certainement à redire sur ce terme certainement trop contemporain.

    Produite par Ariana Vafadari et Vincent Joinville, cette création musicale a été jouée en mars 2020 au Musée du Quai Branly, avec la participation de Fanny Ardant en récitante.

    Ariana Vafadari, Anahita, Quart de Lune, 2020
    https://www.arianavafadari.com
    https://www.facebook.com/arianavafadari.mezzo

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  • Beauvoir : Fille ou garçon

    C'est ici que les petites filles vont d'abord apparaître comme privilégiées. Un second sevrage, moins brutal, plus lent que le premier, soustrait le corps de la mère aux étreintes de l'enfant ; mais c'est aux garçons surtout qu'on refuse peu à peu baisers et caresses ; quant à la fillette, on continue à la cajoler, on lui permet de vivre dans les jupes de sa mère, le père la prend sur ses genoux et flatte ses cheveux ; on l'habille avec des robes douces comme des baisers, on est indulgent à ses larmes et à ses caprices, on la coiffe avec soin, on s'amuse de ses mines et de ses coquetteries : des contacts charnels et des regards complaisants la protègent contre l'angoisse de la solitude. Au petit garçon, au contraire, on va interdire même la coquetterie, ses manoeuvres de séduction, ses comédies agacent. "Un homme ne demande pas qu'on l'embrasse... Un homme ne se regarde pas dans les glaces... Un homme ne pleure pas", lui dit-on. On veut qu'il soit "un petit homme" ; c'est en s'affranchissant des adultes qu'il obtiendra leur suffrage. Il plaira en ne paraissant pas chercher à plaire.

    Beaucoup de garçons, effrayés de la dure indépendance à laquelle on les condamne, souhaitent alors être des filles ; au temps où on les habillait d'abord comme elles, c'est souvent avec des larmes qu'ils abandonnaient la robe pour le pantalon, qu'ils voyaient couper leurs boucles. Certains choisissent obstinément la féminité, ce qui est une des manières de s'orienter vers l'homosexualité : "Je souhaitai passionnément d'être fille et je poussai l'inconscience de la grandeur d'être homme jusqu'à prétendre pisser assis", raconte Maurice Sachs. Cependant si le garçon apparaît d'abord comme moins favorisé que ses soeurs, c'est qu'on a sur lui de plus grands desseins. Les exigences auxquelles on le soumet impliquent immédiatement une valorisation. Dans ses souvenirs Maurras raconte qu'il était jaloux d'un cadet que sa mère et sa grand-mère cajolaient : son père le saisit par la main et l'emmena hors de la chambre : "Nous sommes des hommes ; laissons ces femmes", lui dit-il. On persuade l'enfant que c'est à cause de la supériorité des garçons qu'il leur est demandé davantage ; pour l'encourager dans le chemin difficile qui est le sien, on lui insuffle l'orgueil de sa virilité.

    Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe, tome 1 (1949)

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  • Beauvoir : "On ne naît pas femme : on le devient"

    On ne naît pas femme : on le devient. Aucun destin biologique, psychique, économique ne définit la figure que revêt au sein de la société la femelle humaine ; c'est l'ensemble de la civilisation qui élabore ce produit intermédiaire entre le mâle et le castrat qu'on qualifie de féminin. Seule la médiation d'autrui peut constituer un individu comme un Autre. En tant qu'il existe pour soi, l'enfant ne saurait se saisir comme sexuellement différencié. Chez les filles et les garçons, le corps est d'abord le rayonnement d'une subjectivité, l'instrument qui effectue la compréhension du monde : c'est à travers les yeux, les mains, non par les parties sexuelles qu'ils appréhendent l'univers. Le drame de la naissance, celui du sevrage se déroulent de la même manière pour les nourrissons des deux sexes ; ils ont les mêmes intérêts et les mêmes plaisirs ; la succion est d'abord la source de leurs sensations les plus agréables ; puis ils passent par une phase anale où ils tirent leurs plus grandes satisfactions des fonctions excrétoires qui leur sont communes ; leur développement génital est analogue ; ils explorent leur corps avec la même curiosité et la même indifférence ; du clitoris et du pénis ils tirent un même plaisir incertain ; dans la mesure où déjà leur sensibilité s'objective, elle se tourne vers la mère : c'est la chair féminine douce, lisse élastique qui suscite des désirs sexuels et ces désirs sont préhensifs ; c'est d'une manière agressive que la fille, comme le garçon, embrasse sa mère, la palpe, la caresse ; ils ont la même jalousie s'il naît un nouvel enfant ; ils la manifestent par les mêmes conduites : colères, bouderie, troubles urinaires ; ils recourent aux mêmes coquetteries pour capter l'amour des adultes. Jusqu'à douze ans la fillette est aussi robuste que ses frères, elle manifeste les mêmes capacités intellectuelles ; il n'y a aucun domaine où il lui soit interdit de rivaliser avec eux. Si, bien avant la puberté, et parfois même dès sa toute petite enfance, elle nous apparaît déjà comme sexuellement spécifiée, ce n'est pas que de mystérieux instincts immédiatement la vouent à la passivité, à la coquetterie, à la maternité : c'est que l'intervention d'autrui dans la vie de l'enfant est presque originelle et que dès ses premières années sa vocation lui est impérieusement insufflée.

    Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe, tome 1 (1949)

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  • "Mai 68 vu par les femmes: la prise de conscience du machisme"

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  • Beauvoir : "Laissez-nous exister avant de nous demander de justifier notre existence"

    Comment les femmes auraient-elles jamais eu du génie alors que toute possibilité d’accomplir une œuvre géniale – ou même une œuvre tout court – leur était refusée ? La vieille Europe a naguère accablé de son mépris les Américains barbares qui ne possédaient ni artistes ni écrivains : « Laissez-nous exister avant de nous demander de justifier notre existence », répondit en substance Jefferson. Les Noirs font les mêmes réponses aux racistes qui leur reprochent de n’avoir produit ni un Whitman ni un Melville. Le prolétariat français ne peut non plus opposer aucun nom à ceux de Racine ou de Mallarmé. La femme libre est seulement en train de naître ; quand elle se sera conquise, peut-être justifiera-t-elle la prophétie de Rimbaud : « Les poètes seront ! Quand sera brisé l’infini servage de la femme, quand elle vivra pour elle et par elle, l’homme – jusqu’ici abominable – lui ayant donné son renvoi, elle sera poète elle aussi ! La femme trouvera l’inconnu ! Ses mondes d’idées différeront-ils des nôtres ? Elle trouvera des choses étranges, insondables, repoussantes, délicieuses, nous les prendrons, nous les comprendrons ». Il n’’est pas sûr que ces « mondes d’idées » soient différents de ceux des hommes puisque c’est en s’assimilant à eux qu’elle s’affranchira ; pour savoir dans quelle mesure elle demeurera singulière, dans quelle mesure ces singularités garderont de l’importance, il faudrait se hasarder à des anticipations bien hardies. Ce qui est certain, c’est que jusqu’ici les possibilités de la femme ont été étouffées et perdues pour l’humanité et qu’il est grand temps dans son intérêt et dans celui de tous qu’on lui laisse enfin courir toutes ses chances.

    Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe (1949)

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  • Pfefferkorn : Sexe et genre (2)

    Le mot sexe se réfère aux différences biologiques entre mâles et femelles... Le genre, lui, est une question de culture... Les connexions entre la nature et la culture, ici entre le sexe et le genre, sont elles-mêmes sociales, culturelles et historiques, elles n’ont rien de naturel. Dans cette perspective, le masculin et le féminin sont imposés culturellement au mâle et à la femelle pour en faire un homme et une femme... La définition du masculin et du féminin renvoie désormais à des constructions ou des productions sociales et à des stéréotypes sociaux.

    Roland Pfefferkorn, Inégalités et rapports sociaux (2007)

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  • Pfefferkorn : Sexe et genre

    Le mot sexe se réfère aux différences biologiques entre mâles et femelles... Le genre, lui, est une question de culture... Les connexions entre la nature et la culture, ici entre le sexe et le genre, sont elles-mêmes sociales, culturelles et historiques, elles n’ont rien de naturel. Dans cette perspective, le masculin et le féminin sont imposés culturellement au mâle et à la femelle pour en faire un homme et une femme... La définition du masculin et du féminin renvoie désormais à des constructions ou des productions sociales et à des stéréotypes sociaux.

    Roland Pfefferkorn, Inégalités et rapports sociaux (2007)

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  • Pfefferkorn : Le concept de patriarcat

    Le concept de patriarcat présente deux avantages majeurs. En premier lieu, il permet d’insister sur le fait que l’oppression des femmes résulte d’un fonctionnement systémique qui n’est en aucun cas réductible au système capitaliste. En second lieu, il permet d’introduire la question de l’exploitation par les hommes du travail effectué par les femmes dans le cadre domestique. Il met par conséquent l’accent sur une dimension matérielle de l’oppression qui va bien au-delà de la seule référence à la domination.

    Roland Pfefferkorn, Inégalités et rapports sociaux (2007)

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  • La valise philosophique du mois : les femmes et le mensonge

    La "Valise philosophique" du café philo est toujours disponible et vous accompagne pour illustrer nos débats.

    Comme pour chaque séance, nous vous avons préparé des documents, textes, extraits de films ou de musiques servant à illustrer et enrichir les débats mensuels.

    Sur la colonne de droite, vous pouvez retrouver les documents autour de la séance spéciale du vendredi 6 mars 2020 qui aura pour thème : "La femme est-elle un homme comme les autres?"

    Restez attentifs : régulièrement de nouveaux documents viendront alimenter cette rubrique d'ici la séance.

    Photo : VisionPic .net - Pexels

     

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  • Rousseau : Les inégalités

    C’est de l’homme que j’ai à parler, et la question que j’examine m’apprend que je vais parler à des hommes, car on n’en propose point de semblables quand on craint d’honorer la vérité. Je défendrai donc avec confiance la cause de l’humanité devant les sages qui m’y invitent, et je ne serai pas mécontent de moi-même si je me rends digne de mon sujet et de mes juges.

    Je conçois dans l’espèce humaine deux sortes d’inégalités ; l’une que j’appelle naturelle ou physique parce qu’elle est établie par la nature, et qui consiste dans la différence des âges, de la santé, des forces du corps et des qualités de l’esprit, ou de l’âme; l’autre qu’on peut appeler inégalité morale ou politique parce qu’elle dépend d’une sorte de convention, et qu’elle est établie, ou du moins autorisée par le consentement des hommes. Celle-ci consiste dans les différents privilèges dont quelques-uns jouissent, au préjudice des autres, comme d’être plus riches, plus honorés, plus puissants qu’eux, ou même de s’en en faire obéir.

    On ne peut pas demander quelle est la source de l’inégalité naturelle, parce que la réponse se trouverait énoncée dans la simple définition du mot : on peut encore moi chercher s’il n’y aurait point quelque liaison essentielle entre les deux inégalités; car ce serait demander, en d’autres termes, si ceux qui commandent valent nécessairement mieux que ceux qui obéissent et si la force du corps ou de l’esprit, la sagesse ou la vertu, se trouvent toujours dans les mêmes individus en proportion de la puissance ou de la richesse. Question bonne peut-être à agiter entre des esclaves entendus de leurs maîtres, mais qui ne convient pas à des hommes raisonnables et libres qui cherchent la vérité.»

    Jean-Jacques Rousseau, Discours sur l’inégalité et les fondements de l’inégalité parmi les hommes (1755)

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  • Bourdieu : La domination masculine

    Pour comprendre la domination masculine qui est une forme particulière et particulièrement accomplie de la violence symbolique [...), on peut s’appuyer sur l’analyse d’un ordre institutionnel qui, comme toute institution, existe de deux façons, d’une part, dans les choses, sous forme, par exemple, de divisions spatiales entre les espaces féminins et les espaces masculins, sous forme d’instruments différenciés, masculins ou féminins, etc. et, d’autre part, dans les cerveaux, dans les esprits, sous forme de principes de vision et de division, de taxinomies, de principes de classement...

    La forme spécifique de la domination masculine (est) la violence symbolique comme contrainte par corps. Pour que la domination symbolique fonctionne, il faut que les dominés aient incorporé les structures selon lesquelles les dominants les perçoivent ; que la soumission ne soit pas un acte de la conscience, susceptible d’être compris dans la logique de la contrainte ou dans la logique du consentement alternative...

    Le fondement de la situation dominée de la femme, et sa perpétuation par-delà les différences temporelles et spatiales, réside dans le fait que, dans cette économie, elle est plutôt objet que sujet... Je retiendrai seulement le rôle passif, celui qui est conféré à la femme dans cette logique et qui me semble être au fondement, encore aujourd’hui, du rapport que les femmes entretiennent avec leur corps et qui tient au fait que leur être social est un être-perçu, un percipi, un être pour le regard et, si je puis dire, par le regard et susceptible d’être utilisé, à ce titre, comme un capital symbolique. L’aliénation symbolique à laquelle elles sont condamnées du fait qu’elles sont vouées à être perçues et à se percevoir à travers les catégories dominantes, c’est-à-dire masculines, se retraduit dans l’expérience même que les femmes ont de leur corps et du regard des autres.

    Pierre Bourdieu, Nouvelles réflexions sur la domination masculine (2002)

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  • Beauvoir : Le féminin et la passivité

    Ainsi, la passivité qui caractérisera essentiellement la femme "féminine" est un trait qui se développe en elle dès ses premières années. Mais il est faux de prétendre que c’est là une donnée biologique ; en vérité, c’est un destin qui lui est imposé par ses éducateurs et par la société... On lui apprend que pour plaire il faut chercher à plaire, il faut se faire objet ; elle doit donc renoncer à son autonomie. On la traite comme une poupée vivante et on lui refuse la liberté ; ainsi se noue un cercle vicieux ; car moins elle exercera sa liberté pour comprendre, saisir et découvrir le monde qui l’entoure, moins elle trouvera en lui de ressources, moins elle osera s’affirmer comme sujet ; si on l’y encourageait, elle pourrait manifester la même exubérance vivante, la même curiosité, le même esprit d’initiative, la même hardiesse qu’un garçon.

    Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe (1949)

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  • Beauvoir : On ne naît pas femme, on le devient

    On ne naît pas femme : on le devient. Aucun destin biologique, psychique, économique ne définit la figure que revêt au sein de la société la femelle humaine ; c’est l’ensemble de la civilisation qui élabore ce produit intermédiaire entre le mâle et le castrat qu’on qualifie de féminin. Seule la médiation d’autrui peut constituer un individu comme un Autre. En tant qu’il existe pour soi, l’enfant ne saurait se saisir comme sexuellement différencié... Si, bien avant la puberté, et parfois même dès sa toute petite enfance, (la fille) nous apparaît déjà comme sexuellement spécifiée, ce n’est pas que de mystérieux instincts immédiatement la vouent à la passivité, à la coquetterie, à la maternité : c’est que l’intervention d’autrui dans la vie de l’enfant est presque originelle et que dès ses premières années sa vocation lui est impérieusement insufflée.

    Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe (1949)

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  • Ils ont dit, au sujet du féminisme et de la femme

    "Primitivement, il y avait trois espèces d'hommes, les uns tout hommes, les autres tout femmes, les troisièmes homme et femme, les Androgynes, espèce tout à fait inférieure aux deux premières." [Platon]

    "Les hommes nés des hommes doubles s'aiment entre eux, comme les femmes nées des femmes doubles s'aiment entre elles, comme les femmes nées des Androgynes aiment les hommes, et comme les hommes nés de ces mêmes Androgynes ont de l'amour pour les femmes." [Platon]

    "Malheureuse, tu as crié « ma belle ». Tu aurais fait du joli si tu avais dit ça à l’assemblée !" [Aristophane]

    "La femme est un être occasionnel et accidentel" [Thomas d'Aquin]

    "Je réponds qu'il était nécessaire qu’une femme soit faite, ainsi que le disent les Écritures, une aide pour l’homme ; en réalité pas comme une compagne aidant à d’autres travaux, car on dit que l’homme peut être plus efficacement aidé par un autre homme dans d’autres travaux ; mais elle est une aide au travail de reproduction." [Thomas d'Aquin]

    "Par le mariage la femme devient libre, par lui, l’homme perd sa liberté." [Emmanuel Kant]

    "Il n’y a que les femmes qui sachent aimer; les hommes n’y entendent rien." [Denis Diderot]

    "Le seul aspect de la femme révèle qu’elle n’est
 destinée ni aux grands travaux de l’intelligence, ni aux
 grands travaux matériels. Elle paie sa dette à la vie non
 par l’action mais par la souffrance, les douleurs de l’enfantement, les soins inquiets de l’enfance ; elle doit
 obéir à l’homme, être une compagne patiente qui le 
rassérène." [Arthur Schopenhauer]

    "En tout cas, puisque les lois ont accordé aux femmes les mêmes droits qu’aux hommes, elles auraient bien dû aussi leur conférer une raison virile." [Arthur Schopenhauer]

    "Une moitié de l’espèce humaine est hors de l’égalité, il faut l’y faire rentrer : donner pour contrepoids au droit de l’homme le droit de la femme." [Victor Hugo]

    "Ce qui dans la femme inspire le respect et bien souvent la crainte, c’est sa nature, plus « naturelle » que celle de l’homme (...) [et] le caractère insaisissable (...) de ses désirs et de ses vertus." [Friedrich Nietzsche]

    "A supposer que la vérité soit femme, n’a-t-on pas lieu de soupçonner que tous les philosophes, pour autant qu’ils furent dogmatiques, n’entendent pas grand-chose aux femmes ?" [Friedrich Nietzsche]

    "On ne fonde pas le mariage sur « l’amour », on le fonde sur l’instinct de l’espèce, sur l’instinct de propriété (la femme et les enfants étant des propriétés), sur l’instinct de la domination qui sans cesse s’organise dans la famille en petite souveraineté." [Friedrich Nietzsche]

    "Tout homme porte en soi l’image de la femme qui lui vient de sa mère. C’est elle qui le détermine à respecter les femmes en général ou bien à les mépriser ou bien à ne sentir pour toutes qu’indifférence." [Friedrich Nietzsche]

    "L’amour devient immense, nous ne songeons pas combien la femme réelle y tient peu de place." [Marcel Proust]

    "De tout temps les hommes se sont creusé la tête sur l’énigme de la féminité... Vous aussi, vous ne vous êtes sans doute pas exclus de cette réflexion ; dans la mesure où vous êtes des hommes ; on ne l’attend pas des femmes qui se trouvent parmi vous, elles sont elles-mêmes cette énigme." [Sigmund Freud]

    "Il nous faut maintenant reconnaître que la petite fille est un petit homme." [Sigmund Freud]

    "Les femmes, c'est le continent noir." [Sigmund Freud]

    "Après trente ans passés à étudier la psychologie féminine, je n’ai toujours pas trouvé de réponse à la grande question: Que veulent-elles au juste?" [Sigmund Freud]

    "Appeler les femmes “le sexe faible” est une diffamation ; c’est l’injustice de l’homme envers la femme. Si la non-violence est la loi de l’humanité, l’avenir appartient aux femmes." [Gandhi]

    "Le masculin et le féminin sont les créations culturelles d’une société fondée, entre autres hiérarchies, sur une hiérarchie de genre." [Pierre Bourdieu]

    "On ne naît pas femme : on le devient." [Simone de Beauvoir]

    "La passivité qui caractérisera essentiellement la femme "féminine" est un trait qui se développe en elle dès ses premières années. Mais il est faux de prétendre que c'est là une donnée biologique ; en vérité, c'est un destin qui lui est imposé par ses éducateurs et par la société." [Simone de Beauvoir]

    "[L'homosexualité est] pour la femme une manière parmi d'autres de résoudre les problèmes posés par sa condition en général, par sa situation érotique en particulier." [Simone de Beauvoir]

    "Les femmes se forgent à elles-mêmes les chaînes dont l’homme ne souhaite pas les charger." [Simone de Beauvoir]

    Les droits abstraits sont bien loin d'être partout intégralement reconnus aux femmes : en Suisse, elles ne votent pas encore ; en France la loi de 1942 maintient sous une forme atténuée les prérogatives de l'époux. Et les droits abstraits, nous venons de le dire, n'ont jamais suffi à assurer à la femme une prise concrète sur le monde : entre les deux sexes, il n'y a pas aujourd'hui encore de véritable égalité." [Simone de Beauvoir]

    "On persuade l'enfant que c'est à cause de la supériorité des garçons qu'il leur est demandé davantage ; pour l'encourager dans le chemin difficile qui est le sien, on lui insuffle l'orgueil de sa virilité." [Simone de Beauvoir]

    "Les femmes : j'aimais les couleurs de leurs vêtements ; leur démarche ; la cruauté de certains visages ; de temps en temps, la beauté presque parfaite d'un autre visage, totalement et superbement féminin." [Charles Bukowski]

    "Aliénant et culpabilisant pour les femmes, le mythe de l'instinct maternel se révèle ravageur pour les enfants, et en parti[culier pour les fils." [Élisabeth Badinter]

    "L'amour maternel est infiniment complexe et imparfait. Loin d'être un instinct, il faut plutôt un petit miracle pour que cet amour soit tel qu'on nous le décrit." [Élisabeth Badinter]

    Il faut être ignorant des problèmes identitaires pour croire qu'une même génération d'hommes, élevée dans l'ancien modèle, réussirait d'un coup le triple saut périlleux : la remise en question d'une virilité ancestrale, l'acceptation d'une féminité redoutée et l'invention d'une autre masculinité compatible avec elle." [Élisabeth Badinter]

    Bander est le symbole de sa puissance et le pénis est une arme, disent les radicales américaines, dont l'homme se sert pour posséder et rabaisser la femme." [Élisabeth Badinter]

    "Nous avons rappelé qu’une femme n’est pas femme du fait de sa nature biologique, mais d’abord du fait de sa place dans le système symbolique qui organise les sociétés et les lois de la parole et du langage." Markos Zafiropoulos]

    "Penser la différence sexuelle, c’est jeter le doute, et permettre de libérer la phrase de la pensée. Libérer la pensée de la pensée." [Mireille Calle-Gruber]

    "Cette affirmation de supériorité liée à des métaphores viriles, transparaît assez constamment dans les œuvres de la tradition philosophique." [Michèle Le Doeuff]

    "Je dis "vagin" parce que je veux que cessent ces horreurs." [Eve Ensler]

    "Nous n'avons jamais une relation simple, transparente, indéniable au sexe biologique." [Judth Butler]

    "Nous ne pouvons pas ignorer la sédimentation des normes sexuelles. Nous avons besoin de normes pour que le monde fonctionne, mais nous pouvons chercher des normes qui nous conviennent mieux." [Judth Butler]

    Photo : Elina Krima - Pexels

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  • "Tout peut changer, et les femmes comptaient à Hollywood ?"

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  • Ensler : Les monologues du vagin

    "Vagin." Voilà, ça y est, je l’ai dit. "Vagin" - je le redis. Depuis que je travaille sur cette pièce, je le dis encore et encore. Je le dis au théâtre bien sûr, dans des facultés, dans des salons, dans des cafés, dans des dîners, à la radio, dans beaucoup de pays. Je le dis à la télé quand on me permet de le faire. Je le dis cent vingt trois fois quand je donne ce spectacle, Les Monologues du vagin, qui est fondé sur les interviews de plus de deux cents femmes à propos de leur vagin. Je le dis dans mon sommeil. Je le dis parce que je suis censée ne pas le dire. Je le dis parce que c’est un mot indicible - un mot qui provoque l’angoisse, la gêne, le mépris et le dégoût.
    Je le dis parce que je crois que ce qu’on ne dit pas, on ne le voit pas, on ne le reconnaît pas, on ne se le rappelle pas. Ce qu’on ne dit pas devient un secret et les secrets souvent engendrent la honte, la peur et les mythes. Je le dis parce que je veux pouvoir un jour le dire naturellement, sans éprouver de honte ou de culpabilité.
    Je le dis parce que je n’ai pas trouvé un mot qui soit plus général, qui décrive réellement toute cette zone et tout ce qui la compose. "Chatte" serait certainement un mot bien meilleur, mais il véhicule trop de choses. "Vulve" est un bon mot ; plus spécifique. Mais je crois que la plupart d’entre nous ne savent pas clairement ce qu’inclut la vulve.
    Je dis "vagin", parce que depuis que j’ai commencé à le dire j’ai découvert à quel point j’étais morcelée, à quel point mon esprit était déconnecté de mon corps. Mon vagin était quelque chose là-bas, loin, très loin. Je vivais rarement en lui, je ne lui rendais même pas visite. Trop occupée à travailler, à écrire ; à être une mère, une amie. Je ne voyais pas mon vagin comme ma ressource essentielle, un lieu de subsistance, d’humour et de créativité. C’était une chose lourde, là, chargée de peur. J’avais été violée, petite fille, et bien que j’aie grandi et que j’aie fait tout ce qu’une adulte peut faire avec son vagin, je n’étais jamais vraiment revenue dans cette partie de mon corps après avoir été violée. En fait, j’avais vécu presque toute ma vie sans mon moteur, sans mon centre de gravité, sans mon deuxième cœur.

    Je dis "vagin" parce que je veux que les gens me répondent et ils le font. D’une façon ou d’une autre. Ils ont tout fait pour censurer le mot dans la communication, là où passaient Les Monologues du vagin : dans la pub des grands quotidiens, sur les affiches, sur les billets, sur les enseignes des théâtres, sur les répondeurs où une voix disait seulement Les Monologues ou les Monologues du V.
    Et quand je demande : « Pourquoi ? "Vagin" n’est pas un mot pornographique. Ce n’est qu’un terme médical qui désigne une partie du corps, comme "coude", "main" ou "côte". »
    On me dit : « Ce n’est peut-être pas pornographique, mais c’est sale. Si nos petites filles l’entendent, qu’allons-nous leur dire ? »

    Eve Ensler, Les Monologues du vagin (1996)

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  • Les monologues du vagin

    Depuis sa parution aux États-Unis en 1998, Les Monologues du vagin a déclenché un véritable phénomène culturel : rarement pièce de théatre aura été jouée tant de fois, en tant de lieux différents, devant des publics si divers… Mais que sont donc ces Monologues dans lesquels toutes les femmes se reconnaissent ? Il s’agit ni plus ni moins de la célébration touchante et drole du dernier des tabous : celui de la sexualité féminine. Malicieux et impertinent, tendre et subtil, le chef- d’œuvre d’Eve Ensler donne la parole aux femmes, à leurs fantasmes et craintes les plus intimes. Cette pièce est considérée comme un pilier du féminisme. À ce jour, la pièce a été traduite en 46 langues et interprétée dans plus de cent-trente pays.

    Le Hangar, vendredi 6 mars à partir de 20h30
    Théâtre à partir de 14 ans
    Cie Je est un autre

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  • Les autorités françaises ont-elles menties au sujet du nuage radioactif de Tcherbobyl ?

    Vrai ou faux ? Mensonge ou non ? Après Tchernobyl, les autorités françaises ont-elles vraiment prétendu que le nuage radioactif s'était "arrêté à la frontière" ? Francetvinfo revient sur ce qui apparaît aujourd'hui comme une fake news : lire cette enquête ici. 

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