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[94] "Sait-on ce que l'on désire?"

  • Merci aux participants de la séance du 25 octobre

    Environ 30 personnes étaient présentes lors de la séance au Belman, le vendredi 25 novembre. Le sujet portait sur cette question : "Sait-on ce que m'on désire ?" Merci à tous les participants et à l'équipe de la Médiathèque et de l'AME. 

    L'équipe du café philo fixe d'ores et déjà son prochain rendez-vous le vendredi 20 janvier 2023 pour un débat qui aura pour sujet cette question : "La peur est-elle mauvaise conseillère ?"

    A bientôt.

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  • "Sait-on ce que l’on désire ?"

    Le café philosophique de Montargis proposera une nouveau séance le vendredi 25 novembre 2022 au Belman, à 19 heures. Le débat portera autour de ce sujet : "Sait-on ce que l’on désire ?"

    La connaissance du désir semble aller de soi, tant cette caractéristique fait intrinsèquement partie de l’homme. On désire, on se prive, on se gêne, voire on souffre pour satisfaire des désirs que nous connaîtrions forcément. Mais est-ce si simple ? Ne sommes-nous que des animaux doués d’une conscience ? Le désir est-il positif ou négatif ? Sommes-nous toujours conscients de nos désirs et comment peut-on l’assumer ? Le désir peut-il échapper à notre contrôle ? Peut-on et doit-on le dompter ?

    Ce sont autant de questions qui seront débattues au cours de cette nouvelle soirée philosophique.

    Rendez-vous donc au Belman à Montargis (entrée par l’Hôtel de France), le vendredi 25 décembre 2022 à 19 heures pour cette 94e séance du café philo .

    La participation sera libre et gratuite.  

    Photo : Pexels - Erik Mclean

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  • L'interview de Bruno du Café philo aujourd'hui sur C2L

    A l'occasion du café philo de ce soir ("Sait-on ce que l'on désire ?"), retrouvez sur C2L une interview de Bruno Chiron ce matin  dans la Matinale : http://www.c2l-radio.fr. 

    A bientôt !

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  • Descartes : "Changer mes désirs plutôt que l’ordre du monde"

    Et enfin, comme ce n'est pas assez, avant de commencer à rebâtir le logis où l’on demeure, que de l'abattre, et de faire provision de matériaux et d'architectes, ou s'exercer soi-même à l'architecture, et outre cela d'en avoir soigneusement tracé de dessin, mais qu'il faut aussi s'être pourvu de quelque autre où l’on puisse être logé commodément pendant le temps qu’on y travaillera ; ainsi, afin que je ne demeurasse point irrésolu en mes actions, pendant que la raison m’obligerait de l’être en mes jugements, et que je ne laissasse pas de vivre dès lors le plus heureusement que je pourrais, je me formai une morale par provision, qui ne consistait qu’en trois ou quatre maximes dont je veux bien vous faire part.

    La première était d’obéir aux lois et aux coutumes de mon pays, retenant constamment la religion en laquelle Dieu m’a fait la grâce d’être instruit dès mon enfance, et me gouvernant en toute autre chose suivant les opinions les plus modérées et les plus éloignées de l’excès qui fussent communément reçues en pratique par les mieux sensés de ceux avec lesquels j’aurais à vivre. Car, commençant dès lors à ne compter pour rien les miennes propres, à cause que je les voulais remettre toutes à l’examen, j’étais assuré de ne pouvoir mieux que de suivre celles des mieux sensés...

    Ma seconde maxime était d’être le plus ferme et le plus résolu en mes actions que je pourrais, et de ne suivre pas moins constamment les opinions les plus douteuses lorsque je m’y serais une fois déterminé, que si elles eussent été très assurées : imitant en ceci les voyageurs, qui, se trouvant égarés en quelque forêt, ne doivent pas errer en tournoyant tantôt d’un côté tantôt d’un autre, ni encore moins s’arrêter en une place, mais marcher toujours le plus droit qu’ils peuvent vers un même côté, et ne le changer point pour de faibles raisons, encore que ce n’ait peut-être été au commencement que le hasard seul qui les ait déterminés à le choisir ; car, par ce moyen, s’ils ne vont justement où ils désirent, ils arriveront au moins à la fin quelque part où vraisemblablement ils seront mieux que dans le milieu d’une forêt... 

    Ma troisième maxime était de tâcher toujours plutôt à me vaincre que la fortune, et à changer mes désirs que l’ordre du monde, et généralement de m’accoutumer à croire qu’il n’y a rien qui soit entièrement en notre pouvoir que nos pensées, en sorte qu’après que nous avons fait notre mieux touchant les choses qui nous sont extérieures, tout ce qui manque de nous réussir est au regard de nous absolument impossible...

    Enfin, pour conclusion de cette morale, je m’avisai de faire une revue sur les diverses occupations qu’ont les hommes en cette vie, pour tâcher à faire choix de la meilleure ; et, sans que je veuille rien dire de celles des autres, je pensai que je ne pouvais mieux que de continuer en celle-là même où je me trouvais, c'est-à-dire que d’employer toute ma vie à cultiver ma raison, et m’avancer autant que je pourrais en la connaissance de la vérité, suivant la méthode que je m’étais prescrite."

    René Descartes, Discours de la méthode (1637)

    Photo : Pexels - Marlon Schmeiski

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  • Epictète : "Parmi les choses, les unes dépendent de nous, les autres n’en dépendent pas"

    Parmi les choses, les unes dépendent de nous, les autres n’en dépendent pas. Celles qui dépendent de nous, c’est l’opinion, le vouloir, le désir, l’aversion : en un mot tout ce qui est notre œuvre. Celles qui ne dépendent pas de nous, c’est le corps, les biens, la réputation, les dignités : en un mot tout ce qui n’est pas notre œuvre.

    Et les choses qui dépendent de nous sont par nature libres ; nul ne peut les empêcher, rien ne peut les entraver ; mais celles qui ne dépendent pas de nous sont impuissantes, esclaves, sujettes à empêchement, étrangères à nous.

    Souviens-toi donc que, si tu crois libres ces choses qui de leur nature sont esclaves, et propres à toi celles qui sont étrangères, tu seras entravé, affligé, troublé, tu accuseras dieux et hommes[4]. Mais si tu crois tien cela seul qui est tien, et étranger ce qui en effet t’est étranger, nul ne te forcera jamais à faire une chose, nul ne t’en empêchera ; tu ne te plaindras de personne, tu n’accuseras personne ; tu ne feras pas involontairement une seule action ; personne ne te nuira, et d’ennemi, tu n’en auras point, car tu ne pourras pas même souffrir rien de nuisible.

    Épictète, Manuel (IIe s. ap. JC)

    Photo : Pexels - Cottonbro studio

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  • Platon : La raison et le désordre des passions

    Socrate — Eh bien, voici une autre image qui vient de la même école. Examine si les deux genres de vie, celle du sage et celle du désordonné, ne sont pas comparables à la condition de deux hommes dont chacun aurait à sa disposition de nombreux tonneaux : ceux du premier seraient en bon état et remplis de vin, de miel, de lait, et ainsi de suite, toutes choses rares, coûteuses, qu'on ne se procure pas sans difficultés et sans peine ; mais, une fois ses tonneaux pleins, notre homme n'aurait plus rien à y verser ni à s'en occuper ; il serait, à cet égard, parfaitement tranquille. L'autre homme, comme le premier, aurait le moyen de se procurer, non sans peine, des liquides divers, mais ses tonneaux seraient en mauvais état et fuiraient, de sorte qu'il serait forcé de travailler nuit et jour à les remplir, sous peine des plus dures privations. Ces deux manières de vivre sont exactement celles de l'intempérant et de l'homme sage : lequel des deux te paraît le plus heureux ? Ai-je réussi par mon discours à te persuader qu'une vie bien réglée vaut mieux qu'une vie désordonnée : oui ou non ?

    Calliclès — Tu n'y as point réussi, Socrate. L'homme aux tonneaux pleins n'a plus aucun plaisir, et c'est justement là ce que j'appelais tout à l'heure vivre à la façon d'une pierre : une fois les tonneaux remplis, on n'a plus ni joie ni peine ; mais ce qui fait l'agrément de la vie, c'est de verser le plus possible."

    Platon, Gorgias (Ve s. av JC)

    Photo : Pexels - Marek Piwnicki

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  • La valise philosophique du mois, séance du 25 novembre 2022

    Retrouvez notre traditionnelle "Valise philosophique" du mois. Elle est consacrée à la séance du vendredi 25 novembre qui aura pour sujet : "Sait-on ce que l'on désire ?"

    Comme pour chaque séance, nous vous avons préparé (colonne de gauche) des documents, textes, extraits de films ou de musiques servant à illustrer et enrichir les débats mensuels.

    Restez attentifs : régulièrement de nouveaux documents viendront alimenter cette rubrique d'ici la séance.

    Photo : Mikhail Nilov- Pexels

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  • Ils ont dit, au sujet du désir

    "Mieux vaut l’ordre de l’âme que les désirs insatiables opposés à la raison." [Platon]

    "quiconque éprouve le désir de quelque chose, désire ce dont il ne dispose pas et ce qui n’est pas présent." [Platon]

    "L'homme aux tonneaux pleins n'a plus aucun plaisir, et c'est justement là ce que j'appelais tout à l'heure vivre à la façon d'une pierre : une fois les tonneaux remplis, on n'a plus ni joie ni peine." [Platon]

    "Le désir est l’appétit de l’agréable." [Aristote]

    "Il faut se rendre compte que parmi nos désirs les uns sont naturels, les autres vains, et que, parmi les désirs naturels, les uns sont nécessaires et les autres naturels seulement." [Épicure] 

    "Parmi les choses, les unes dépendent de nous, les autres n’en dépendent pas." [Épictète] 

    "Ce n'est pas par la satisfaction du désir que s'obtient la liberté, mais par la destruction du désir." [Épictète] 

    "Il faut changer ses désirs plutôt que l’ordre du monde." [René Descartes]

    "Le désir est l’appétit accompagné de la conscience de lui-même." [Baruch Spinoza]

    "Le désir qui naît de la joie est plus fort que le désir qui naît de la tristesse." [Baruch Spinoza]

    "Les hommes sont conscients de leurs désirs et ignorants des causes qui les déterminent." [Baruch Spinoza]

    "Nous ne désirons aucune chose parce que nous la trouvons bonne mais, au contraire, nous jugeons qu’une chose est bonne parce que nous la désirons." [Baruch Spinoza]

    "Les hommes sont conduits plutôt par le désir aveugle que par la raison." [Baruch Spinoza]

    "Malheur à qui n'a plus rien à désirer ! Il perd pour ainsi dire tout ce qu'il possède. On jouit moins de ce qu'on obtient que de ce qu'on espère et l'on n'est heureux qu'avant d'être heureux." [Jean-Jacques Rousseau] 

    "L’homme est conscience de soi et capacité de dire « Je »." [Emmanuel Kant]

    "L’homme se définit comme désir négateur, lequel permet d’accéder à la conscience de soi." [Emmanuel Kant]

    "Ce n'est pas dans la jouissance que consiste le bonheur, c'est dans le désir, c'est à briser les freins qu'oppose à ce désir." [Sade]

    "L’homme est conscience de soi, cette conscience est déchirée." [Hegel]

    "L’homme vacille ainsi entre peine et souffrance." [Arthur Schopenhauer]

    "Le désir est énergie mais aussi vie dans l’instant pur." [Soren Kierkegaard]

    "Le désir est signe de guérison ou d'amélioration." [Friedrich Nietzsche]

    "Nous n'arrivons pas à changer les choses suivant notre désir, mais peu à peu notre désir change." [Marcel Proust]

    "Par source de la pulsion, on entend le processus somatique qui est localisé dans un organe ou une partie du corps et dont l'excitation est représentée dans la vie psychique par la pulsion." [Sigmund Freud]

    "Le rêve est la satisfaction d’un désir." [Sigmund Freud]

    "“L'homme est une création du désir, non pas une création du besoin." [Gaston Bachelard]

    "Le désir est manque et dépassement de son manque." [Jean-Paul Sartre]

    "Le désir est une conduite d'envoûtement." [Jean-Paul Sartre]

    "Tout désir naît d’un manque et représente un cycle sans fin." [Jean-Paul Sartre]

    "L’homme doit assumer son désir et agir en conformité avec lui." [Jacques Lacan]

    "Le désir est inextinguible." [Jacques Lacan]

    "Tout se réduit en somme au désir et à l’absence de désir. Le reste est nuance." [Emil Cioran]

    "Peut-être aucun autre type de société n'a jamais accumulé, et dans une histoire relativement si courte, une telle quantité de discours sur le sexe. De lui, il se pourrait bien que nous parlions plus que de toute autre chose." [Michel Foucault]

    Photo : Pexels – Marcela Oliveira

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  • Platon : Le désir et Eros

    SOCRATE : Tout ce que je veux savoir, c’est si Eros éprouve ou non le désir de ce dont il est amour.
    AGATHON : Assurément, il en éprouve le désir.
    – Est-ce le fait de posséder ce qu’il désire et ce qu’il aime qui fait qu’il le désire et qu’il l’aime, ou le fait de ne pas le posséder ?
    – Le fait de ne pas le posséder, cela du moins est vraisemblable.
    – Examine donc si au lieu d’une vraisemblance il ne s’agit pas d’une nécessité : il y a désir de ce qui manque, et il n’y a pas désir de ce qui ne manque pas ? Il me semble à moi, Agathon, que cela est une nécessité qui crève les yeux ; que t’en semble-t-il ?
    – C’est bien ce qu’il me semble.
    – Tu dis vrai. Est-ce qu’un homme qui est grand souhaiterait être grand, est-ce qu’un homme qui est fort souhaiterait être fort ?
    – C’est impossible, suivant ce que nous venons d’admettre.
    – Cet homme ne saurait manquer de ces qualités, puisqu’il les possède.
    – Tu dis vrai.
    – Supposons en effet qu’un homme qui est fort souhaite être fort, qu’un homme qui est rapide souhaite être rapide, qu’un homme qui est en bonne santé souhaite être en bonne santé, car quelqu’un estimerait peut-être que, en ce qui concerne ces qualités et toutes celles qui ressortissent au même genre, les hommes qui sont tels et qui possèdent ces qualités, désirent encore les qualités qu’ils possèdent. C’est pour éviter de tomber dans cette erreur que je m’exprime comme je le fais. Si tu considères, Agathon, le cas de ces gens-là, il est forcé qu’ils possèdent présentement les qualités qu’ils possèdent, qu’ils le souhaitent ou non. En tout cas, on ne saurait désirer ce que précisément on possède. Mais supposons que quelqu’un nous dise : "Moi, qui suis en bonne santé, je n’en souhaite pas moins être en bonne santé, moi, qui suis riche, je n’en souhaite pas moins être riche ; cela même que je possède, je ne désire pas moins le posséder." Nous lui ferions cette réponse : "Toi, bonhomme, qui es doté de richesse, de santé et de force, c’est pour l’avenir que tu souhaites en être doté, puisque, présentement en tout cas, bon gré mal gré, tu possèdes tout cela. Ainsi, lorsque tu dis éprouver le désir de ce que tu possèdes à présent, demande-toi si ces mots ne veulent pas tout simplement dire ceci : « Ce que j’ai à présent, je souhaite aussi l’avoir dans l’avenir. »" Il en conviendrait, n’est-ce pas ? […] Dans ces conditions, aimer ce dont on n’est pas encore pourvu et qu’on ne possède pas, n’est-ce pas souhaiter que, dans l’avenir, ces choses-là nous soient conservées et nous restent présentes ?
    – Assurément.
    – Aussi l’homme qui est dans ce cas, et quiconque éprouve le désir de quelque chose, désire ce dont il ne dispose pas et ce qui n’est pas présent ; et ce qu’il n’a pas, ce qu’il n’est pas lui-même, ce dont il manque, tel est le genre de choses vers quoi vont son désir et son amour. »

    Platon, Le Banquet (Ve s. av. JC)

    Photo : Pexels - Kristina Chuprina

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  • Schopenhauer : Désir et souffrance

    Tout désir naît d’un manque, d’un état qui ne nous satisfait pas ; donc il est souffrance, tant qu’il n’est pas satisfait. Or, nulle satisfaction n’est de durée ; elle n’est que le point de départ d’un désir nouveau. Nous voyons le désir partout arrêté, partout en lutte, donc toujours à l’état de souffrance ; pas de terme dernier à l’effort ; donc pas de mesure, pas de terme à la souffrance […] Mais que la volonté vienne à manquer d’objet, qu’une prompte satisfaction vienne à lui enlever tout motif de désirer, et les voilà tombés dans un vide épouvantable, dans l’ennui ; leur nature, leur existence, leur pèse d’un poids intolérable. La vie donc oscille, comme un pendule, de droite à gauche, de la souffrance à l’ennui ; ce sont là les deux éléments dont elle est faite, en somme. »

    Arthur Schopenhauer, Le monde comme Volonté et comme Représentation (1818)

    Photo : Pexels - Alycia Fung

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  • Foucault : Au sujet de la sexualité

    002845347.jpgDepuis le XVIIIe siècle, le sexe n'a pas cessé de provoquer une sorte d'éréthisme discursif généralisé. Et ces discours sur le sexe ne se sont pas multipliés hors du pouvoir ou contre lui ; mais là même où il s'exerçait et comme moyen de son exercice ; partout ont été aménagées des incitations à parler, partout des dispositifs à entendre et à enregistrer, partout des procédures pour observer, interroger et formuler. On le débusque et on le contraint à une existence discursive. De l'impératif singulier qui impose à chacun de faire de sa sexualité un discours permanent, jusqu'aux mécanismes multiples qui, dans l'ordre de l'économie, de la pédagogie, de la médecine, de la justice, incitent, extraient, aménagent, institutionnalisent le discours du sexe, c'est une immense prolixité que notre civilisation a requise et organisée. Peut-être aucun autre type de société n'a jamais accumulé, et dans une histoire relativement si courte, une telle quantité de discours sur le sexe. De lui, il se pourrait bien que nous parlions plus que de toute autre chose ; nous nous acharnons à cette tâche ; nous nous convainquons par un étrange scrupule que nous n'en disons jamais assez, que nous sommes trop timides et peureux, que nous nous cachons l'aveuglante évidence par inertie et par soumission, et que l'essentiel nous échappe toujours, qu'il faut encore partir à sa recherche. Sur le sexe, la plus intarissable, la plus impatiente des sociétés, il se pourrait que ce soit la nôtre.

    Michel Foucault, Histoire de la sexualité, tome 1 : La volonté de savoir (1976)

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  • Epicure : "Parmi nos désirs les uns sont naturels, les autres vains"

    Il faut se rendre compte que parmi nos désirs les uns sont naturels, les autres vains, et que, parmi les désirs naturels, les uns sont nécessaires et les autres naturels seulement. Parmi les désirs nécessaires, les uns sont nécessaires pour le bonheur, les autres pour la tranquillité du corps, les autres pour la vie même. Et en effet une théorie non erronée des désirs doit rapporter tout choix et toute aversion à la santé du corps et à l’ataraxie de l’âme, puisque c’est là la perfection même de la vie heureuse. Car nous faisons tout afin d’éviter la douleur physique et le trouble de l’âme. Lorsqu’une fois nous y avons réussi, tout l’agitation de l’âme tombe, l’être vivant n’ayant plus à s’acheminer vers quelque chose qui lui manque, ni à chercher autre chose pour parfaire le bien-être de l’âme et celui du corps. Nous n’avons en effet besoin du plaisir que quand, par suite de son absence, nous éprouvons de la douleur; et quand nous n’éprouvons pas de douleur, nous n’avons plus besoin du plaisir.

    C’est pourquoi nous disons que le plaisir est le commencement et la fin de la vie heureuse. En effet, d’une part, le plaisir est reconnu par nous comme le bien primitif et conforme à notre nature, et c’est de lui que nous partons pour déterminer ce qu’il faut choisir et ce qu’il faut éviter; d’autre part, c’est toujours à lui que nous aboutissons, puisque ce sont nos affections qui nous servent de règles pour mesurer et apprécier tout bien quelconque si complexe qu’il soit. Mais précisément parce que le plaisir est le bien primitif et conforme à notre nature, nous ne recherchons pas tout plaisir, et il y a des cas où nous passons par-dessus beaucoup de plaisirs, savoir lorsqu’ils doivent avoir pour suite des peines qui les surpassent; et, d’autre part, il y a des douleurs que nous estimons valoir mieux que des plaisirs, savoir lorsque après avoir longtemps supporté les douleurs, il doit résulter de là pour nous un plaisir qui les surpasse. Tout plaisir, pris en lui-même et dans sa nature propre, est donc un bien, et cependant tout plaisir n’est pas à rechercher; pareillement, toute douleur est un mal, et pourtant toute douleur ne doit pas être évitée. En tout cas, chaque plaisir et chaque douleur doivent être appréciés par une comparaison des avantages et des inconvénients à attendre. Car le plaisir est toujours le bien, et la douleur le mal, seulement il y a des cas où nous traitons le bien comme un mal, et le mal, à son tour, comme un bien. C’est un grand bien à notre avis que de se suffire à soi-même, non qu’il faille toujours vivre de peu, mais afin que si l’abondance nous manque, nous sachions nous contenter du peu que nous aurons, bien persuadés que ceux-là jouissent le plus vivement de l’opulence qui ont le moins besoin d’elle, et que tout ce qui est naturel est aisé à se procurer, et ce qui ne répond pas à un désir naturel, malaisé à se procurer.

    Epicure, Lettre à Ménécée (IVe s. av. JC)

    Photo : Pexels - Polina Tankilevitch

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  • Sartre : L'amour comme appropriation d'autrui

    61H6ialivRL.jpgEn soi Autrui-objet n'a jamais assez de force pour occasionner l'amour. Si l'amour a pour idéal l'appropriation d'autrui en tant qu'autrui, c'est-à-dire en tant que subjectivité regardante, cet idéal ne peut être projeté qu'à partir de ma rencontre avec autrui-sujet, non avec autrui-objet. La séduction ne peut parer autrui-objet qui tente de me séduire que du caractère d'objet précieux "à posséder" ; elle me déterminera peut-être à risquer gros pour le conquérir; mais ce désir d'appropriation d'un objet au milieu du monde ne saurait être confondu avec l'amour. L'amour ne saurait donc naître chez l'aimé que de l'épreuve qu'il fait de son aliénation et de sa fuite vers l'autre. Mais, de nouveau, l'aimé, s'il en est ainsi, ne se transformera en amant que s'il projette d'être aimé, c'est-à-dire si ce qu'il veut conquérir n'est point un corps mais la subjectivité de l'autre en tant que telle. Le seul moyen, en effet, qu'il puisse concevoir pour réaliser cette appropriation, c'est de se faire aimer. Ainsi nous apparaît-il qu'aimer est, dans son essence, le projet de se faire aimer. D'où cette nouvelle contradiction et ce nouveau conflit: chacun des amants est entièrement captif de l'autre en tant qu'il veut se faire aimer par lui à l'exclusion de tout autre ; mais en même temps, chacun exige de l'autre un amour qui ne se réduit nullement au "projet d'être-aimé". Ce qu'il exige, en effet, c'est que l'autre, sans chercher originellement à se faire aimer, ait une intuition à la fois contemplative et affective de son aimé comme la limite objective de sa liberté, comme le fondement inéluctable et choisi de sa transcendance, comme la totalité d'être et la valeur suprême. L'amour ainsi exigé de l'autre ne saurait rien demander : il est pur engagement sans réciprocité.

    Jean-Paul Sartre, L'Être et le Néant (1943)

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  • Platon : "Pour bien vivre, il faut laisser prendre à ses passions tout l'accroissement possible"

    Gorgias.jpgCALLICLES - Voici ce qui est beau et juste suivant la nature, je te le dis en toute franchise, c'est que pour bien vivre, il faut laisser prendre à ses passions tout l'accroissement possible, au lieu de les réprimer, et, quand elles ont atteint toute leur force, être capable de leur donner satisfaction par son courage et son intelligence et de remplir tous ses désirs à mesure qu'ils éclosent.

    Mais cela n'est pas, je suppose, la portée du vulgaire. De là vient qu'il décrie les gens qui en sont capables, parce qu'il a honte de lui-même et veut cacher sa propre impuissance. Il dit que l'intempérance est une chose laide, essayant par là d'asservir ceux qui sont mieux doués par la nature, et ne pouvant lui même fournir à ses passions de quoi les contenter, il fait l'éloge de la tempérance et de la justice à cause de sa propre lâcheté... La vérité que tu prétends chercher, Socrate, la voici : le luxe, l'incontinence et la liberté, quand ils sont soutenus par la force, constituent la vertu et le bonheur ; le reste, toutes ces belles idées, ces conventions contraires à la nature, ne sont que niaiseries et néant.

    Platon, Gorgias (Ve s. av. JC)

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  • Platon : "Jamais nous ne posséderons en suffisance l'objet de notre désir"

    Aussi longtemps que nous aurons notre corps et que notre âme sera pétrie avec cette chose mauvaise, jamais nous ne posséderons en suffisance l'objet de notre désir. Or cet objet, c'est disons-nous, la vérité. Et non seulement mille et mille tracas nous sont en effet suscités par le corps à l'occasion des nécessités de la vie ; mais, des maladies surviennent-elles, voilà pour nous de nouvelles entraves dans notre chasse au réel ! Amours, désirs, craintes, imaginations de toute sorte, innombrables sornettes, il nous en remplit si bien, que par lui (oui, c'est vraiment le mot connu) ne nous vient même, réellement, aucune pensée de bon sens ; non, pas une fois ! Voyez plutôt : les guerres, les dissensions, la bataille, il n'y a pour les susciter que le corps et ses convoitises ; la possession des biens, voilà en effet la cause originelle de toutes les guerres, et, si nous sommes poussés à nous procurer des biens, c'est à cause du corps, esclaves attachés à son service ! Par sa faute encore, nous mettons de la paresse à philosopher à cause de tout cela.

    Mais ce qui est le comble, c'est que, sommes-nous arrivés enfin à avoir de son côté quelque tranquillité, pour nous tourner alors vers un objet quelconque de réflexion, nos recherches sont à nouveau bousculées en tous sens par cet intrus qui nous assourdit, nous trouble et nous démonte, au point de nous rendre incapables de distinguer le vrai. Inversement, nous avons eu réellement la preuve que, si nous devons jamais savoir purement quelque chose, il nous faudra nous séparer de lui et regarder avec l'âme en elle-même les choses en elles-mêmes. C'est alors, à ce qu'il semble, que nous appartiendra ce dont nous nous déclarons amoureux : la pensée ; oui, alors que nous aurons trépassé, ainsi que le signifie l'argument, et non point durant notre vie !

    Platon, Phédon (V s. av. JC)

    Photo : Pexels - Mariana Ayumi

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  • Annie Ernaux : Passion simple

    71O0n3co-YL.jpgÀ partir du mois de septembre l'année dernière, je n'ai plus rien fait d'autre qu'attendre un homme : qu'il me téléphone et qu'il vienne chez moi... Je n'avais pas d'autre avenir que le prochain coup de téléphone fixant un rendez-vous... J'évitais aussi d'utiliser l'aspirateur ou le sèche-cheveux qui m'auraient empêchée d'entendre la sonnerie. Celle-ci me ravageait d'un espoir qui ne durait souvent que le temps de saisir lentement l'appareil et de dire allô. En découvrant que ce n'était pas lui, je tombait dans une telle déception que je prenais en horreur la personne au bout du fil. Dès que j'entendais la voix de A., mon attente indéfinie, douloureuse, jalouse évidemment, se néantisait si vite que j'avais l'impression d'avoir été folle et de redevenir subitement normale. J'étais frappée par l'insignifiance, au fond, de cette voix et l'importance démesurée qu'elle avait dans ma vie.

    Annie Ernaud, Passion simple (1992)

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  • Freud : "Le but d'une pulsion est toujours la satisfaction"

    Si, en nous plaçant d'un point de vue biologique, nous considérons maintenant la vie psychique, le concept de "pulsion" nous apparaît comme un concept-limite entre le psychique et le somatique, comme le représentant psychique des excitations, issues de l'intérieur du corps et parvenant au psychisme, comme une mesure de l'exigence de travail qui est imposée au psychique en conséquence de sa liaison au corporel.

    Nous pouvons maintenant discuter quelques termes qui sont utilisés en rapport avec le concept de pulsion, comme : poussée, but, objet, source de la pulsion.

    Par poussée d'une pulsion on entend le facteur moteur de celle-ci, la somme de force ou la mesure d'exigence de travail qu'elle représente. Le caractère « poussant » est une propriété générale des pulsions, et même l'essence de celles-ci. Toute pulsion est un morceau d'activité ; quand on parle, d'une façon relâchée, de pulsions passives, on ne peut rien vouloir dire d'autre que pulsions à but passif.

    Le but d'une pulsion est toujours la satisfaction, qui ne peut être obtenue qu'en supprimant l'état d'excitation la source de la pulsion Mais, quoique ce but final reste invariable pour chaque pulsion, diverses voies peuvent mener au même but final, en sorte que différents buts, plus proches ou intermédiaires, peuvent s'offrir pour une pulsion ; ces buts se combinent ou s'échangent les uns avec les autres. L'expérience nous autorise aussi à parler de pulsions « inhibées quant au but », dans les cas de processus pour lesquels une certaine progression dans la voie de la satisfaction pulsionnelle est tolérée, mais qui, ensuite, subissent une inhibition ou une dérivation. On peut supposer que même de tels processus ne vont pas sans une satisfaction partielle.

    L'objet de la pulsion est ce en quoi ou par quoi la pulsion peut atteindre son but. Il est ce qu'il y a de plus variable dans la pulsion, il ne lui est pas originairement lié : mais ce n'est qu'en raison de son aptitude particulière à rendre possible la satisfaction qu'il est adjoint. Ce n'est pas nécessairement un objet étranger, mais c'est tout aussi bien une partie du corps propre. Il peut être remplacé à volonté tout au long des destins que connaît la pulsion ; c'est à ce déplacement de la pulsion que revient rôle le plus important. Il peut arriver que le même objet serve simultanément à la satisfaction de plusieurs pulsions : c'est le cas de ce qu'Alfred Adler appelle l'entrecroisement des pulsions. Lorsque la liaison de la pulsion à l'objet est particulièrement intime, nous la distinguons par le terme de fixation. Elle se réalise souvent dans les périodes du tout début du développement de la pulsion et met fin à la mobilité de celle-ci en résistant intensément à toute dissolution.

    Par source de la pulsion, on entend le processus somatique qui est localisé dans un organe ou une partie du corps et dont l'excitation est représentée dans la vie psychique par la pulsion. Nous ne savons pas si ce processus est strictement de nature chimique ou s'il peut aussi correspondre à une libération d'autres forces, mécaniques par exemple. l'étude des sources pulsionnelle déborde le champs de la psychologie."

    Sigmund Freud, "Pulsions et destin des pulsions, in Métapsychologie (1912)

    Photo : Pexels - Inna Mykytas

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  • Spinoza : Le désir ne veut rien

    L'essence de l'âme est constituée par des idées adéquates et des inadéquates; par suite, elle s'efforce de persévérer dans son être en tant qu'elle a les unes et aussi en tant qu'elle a les autres ; et cela pour une durée indéfinie. Puisque, d'ailleurs, l'âme, par les idées des affections du corps, a nécessairement conscience d'elle-même, elle a conscience de son effort.

    Cet effort, quand il se rapporte à l'âme seule, est appelé volonté; mais, quand il se rapporte à la fois à l'âme et au corps, il est appelé appétit; l'appétit n'est par là rien d'autre que l'essence même de l'homme, de la nature de laquelle suit nécessairement ce qui sert à sa conservation; et l'homme est ainsi déterminé à le faire. De plus, il n'y a aucune différence entre l'appétit et le désir, sinon que le désir se rapporte généralement aux hommes en tant qu'ils ont conscience de leurs appétits, et peut, pour cette raison se définir ainsi: le désir est l'appétit avec la conscience de lui-même. Il est donc établi par tout ce qui précède que nous ne faisons effort vers aucune chose, que nous ne la voulons pas ou ne tendons pas vers elle par appétit ou par désir, parce que nous jugeons qu'elle est bonne; c'est l'inverse : nous jugeons qu'une chose est bonne parce que nous faisons effort vers elle, que nous la voulons et tendons vers elle par appétit ou désir.

    Baruch Spinoza, Ethique, prop. IX, scolie (1675)

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  • Aristote : Le désir veut le plaisir

    Le fait que tous les êtres, bêtes et hommes, poursuivent le plaisir est un signe que le plaisir est en quelque façon le Bien Suprême : Nulle rumeur ne meurt tout entière, que tant de gens Mais comme ce n’est ni la même nature, ni la même disposition qui est la meilleure pour tout le monde, ou qui du moins apparaît telle à chacun, tous les hommes ne poursuivent pas non plus le même plaisir, bien que tous poursuivent le plaisir. Peut-être aussi poursuivent-ils non pas le plaisir qu’ils s’imaginent ou qu’ils voudraient dire qu’ils recherchent, mais un plaisir le même pour tous, car tous les êtres ont naturellement en eux quelque chose de divin. Mais les plaisirs corporels ont accaparé l’héritage du nom de plaisir, parce que c’est vers eux que nous dirigeons le plus fréquemment notre course et qu’ils sont le partage de tout le monde ; et ainsi, du fait qu’ils sont les seuls qui nous soient familiers, nous croyons que ce sont les seuls qui existent.

    Il est manifeste aussi que si le plaisir, autrement dit l’activité, n’est pas un bien, la vie de l’homme heureux ne sera pas une vie agréable : pour quelle fin aurait-il besoin du plaisir si le plaisir n’est pas un bien ? Au contraire sa vie peut même être chargée de peine : car la peine n’est ni un bien ni un mal, si le plaisir n’est non plus ni l’un ni l’autre dans ces conditions pourquoi fuirait-on la peine ? Dès lors aussi la vie de l’homme vertueux ne sera pas plus agréable qu’une autre, si ses activités ne le sont pas non plus davantage. Au sujet des plaisirs du corps il faut examiner la doctrine de ceux qui disent qu’assurément certains plaisirs sont hautement désirables, par exemple les plaisirs nobles, mais qu’il n’en est pas ainsi des plaisirs corporels et de ceux qui sont le domaine de l’homme déréglé. S’il en est ainsi, pourquoi les peines contraires sont-elles mauvaises ? Car le contraire d’un mal est un bien. Ne serait-ce pas que les plaisirs qui sont nécessaires sont bons au sens où ce qui n’est pas mauvais est bon ? Ou encore que ces plaisirs sont bons jusqu’à un certain point ? En effet, si dans les dispositions et les mouvements qui n’ad mettent pas d’excès du mieux il n’y a pas non plus d’excès possible du plaisir correspondant, dans les états admettant au contraire cette sorte d’excès il y aura aussi excès du plaisir. Or, les biens du corps admettent l’excès, et c’est la poursuite de cet excès qui rend l’homme pervers, et non pas celle des plaisirs nécessaires : car si tous les hommes jouissent d’une façon quelconque des mets, des vins et des plaisirs sexuels, tous n’en jouissent pas dans la mesure qu’il faut. 

    Aristote, Ethique à Nicomaque (IV s. av. JC)

    Photo : Pexels - Victoria Aakvarel

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  • Madame de La Fayette : La Princesse de Clèves

    81NNH-z6yXL.jpgIl parut alors une beauté à la cour, qui attira les yeux de tout le monde, et l'on doit croire que c'était une beauté parfaite, puisqu'elle donna de l'admiration dans un lieu où l'on était si accoutumé à voir de belles personnes. Elle était de la même maison que le vidame de Chartres, et une des plus grandes héritières de France. Son père était mort jeune, et l'avait laissée sous la conduite de madame de Chartres, sa femme, dont le bien, la vertu et le mérite étaient extraordinaires. Après avoir perdu son mari, elle avait passé plusieurs années sans revenir à la cour. Pendant cette absence, elle avait donné ses soins à l'éducation de sa fille ; mais elle ne travailla pas seulement à cultiver son esprit et sa beauté ; elle songea aussi à lui donner de la vertu et à la lui rendre aimable. La plupart des mères s'imaginent qu'il suffit de ne parler jamais de galanterie devant les jeunes personnes pour les en éloigner. Madame de Chartres avait une opinion opposée ; elle faisait souvent à sa fille des peintures de l'amour ; elle lui montrait ce qu'il a d'agréable pour la persuader plus aisément sur ce qu'elle lui en apprenait de dangereux ; elle lui contait le peu de sincérité des hommes, leurs tromperies et leur infidélité, les malheurs domestiques où plongent les engagements ; et elle lui faisait voir, d'un autre côté, quelle tranquillité suivait la vie d'une honnête femme, et combien la vertu donnait d'éclat et d'élévation à une personne qui avait de la beauté et de la naissance. 

    Madame de La Fayette, La Princesse de Clèves (1878)

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  • Prochaine séance le 25 novembre 2022

    Le café philosophique de Montargis proposera sa prochaine séance le vendredi 25 novembre 2022 à 19 heures au Belman (entrée, Hôtel de France, Montargis).

    Le débat portera autour de cette question : "Sait-on ce que l'on désire ?"

    A bientôt.

    Affiche de la séance "Sait-on ce que l'on désire ?"

     

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