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Spinoza : L'Etat et la violence

On connaît facilement quelle est la condition d’un État quelconque en considérant la fin en vue de laquelle un état civil se fonde ; cette fin n’est autre que la paix et la sécurité de la vie. Par suite, le gouvernement le meilleur est celui sous lequel les hommes passent leur vie dans la concorde et celui dont les lois sont observées sans violation. Il est certain en effet que les séditions, les guerres et le mépris ou la violation des lois sont imputables, non tant à la méchanceté des sujets qu’à un vice du régime institué. Les hommes, en effet, ne naissent pas citoyens, mais le deviennent. Les affections naturelles qui se rencontrent sont en outre les mêmes en tout pays ; si, donc, une méchanceté plus grande règne dans une cité et s’il s’y commet des fautes en plus grand nombre que dans d’autres, cela provient de ce qu’elle n’a pas assez pourvu à la concorde, que ses institutions ne sont pas assez prudentes et qu’elle n’a pas, en conséquence, établi absolument un droit civil. Un état civil, en effet, qui n’a pas supprimé les causes de sédition et où la guerre est constamment à craindre, où les lois sont fréquemment violées, ne diffère pas beaucoup de l’état de nature où chacun, au plus grand péril de sa vie, agit selon son tempérament propre.

Baruch Spinoza, Traité politique (1675)

Photo : Pexels - Vincent M.A. Janssen

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