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COMPTE RENDU DE LA DERNIÈRE SÉANCE

Thème du débat : "Pensées sectaires : où s'arrête ma liberté ?"

Date : 24 juin 2011 à la Brasserie du centre commercial de la Chaussée.

À la Brasserie du centre commercial de la Chaussée, un public deux fois plus nombreux que d’habitude (plus de cinquante personnes) était venu le vendredi 24 juin assister à séance du café philosophique intitulée "Pensées sectaires : où s’arrête ma liberté ?".

Pour l’occasion, Claire et Bruno avaient invité Catherine Armessen. Médecin et écrivain, cette dernière a travaillé longuement sur le sujet et y a consacré un roman, Manipulation (éd. Cheminements), récompensé par le prix Littré en 2008.

Le débat n’entendait pas faire une description complète des sectes mais plutôt de s’interroger sur la liberté individuelle de chacun à adhérer ou non à ces mouvements religieux. Finalement la question du libre-arbitre se pose bien, les sectes étant autorisées par les lois, même si leurs activités sont surveillées. Claire s’interroge sur la manière dont fonctionne la manipulation : "Autrui est-il vraiment capable d’aliéner ma liberté ?", "Puis-je choisir, en toute liberté, d’aliéner cette liberté ?" et "Quels sont les moyens d’aliéner ma liberté ?"

Un participant voit dans le développement des sectes un symptôme, "finalement pas si mauvais", d’une demande dans nos sociétés de spiritualité. D’ailleurs, ajoute-t-il, la différence entre religions officielles et sectes est tenue : "une religion n’est-elle pas une secte qui a réussi ?" Bruno précise que cette assertion assez courante est un détournement du sens de la citation d'Ernest Renan (La Vie de Jésus) : "Le christianisme est un essénisme qui a réussi" (l’essénisme était un mouvement juif sectaire auquel appartenait, semble-t-il, Jésus).

Il est évident que la manipulation est omniprésente dans nos sociétés modelées par la communication (le politique face à ses électeurs, le professeur face à ses élèves, etc.). Dans le cadre des sectes, la manipulation, moyen d’aliénation de la liberté, est un outil particulièrement efficace, rôdé et redoutable.

Comment cette manipulation fonctionne-t-elle ? 

Pour répondre sur ce point, plutôt qu’un long discours technique, Catherine Armessen a choisi de prendre l’exemple imaginaire d’un jeune homme (qu’elle prénomme Martin), jeune homme semblable a des millions d’autres, inséré dans la société mais s’interrogeant sur lui-même et mal dans sa peau. La mécanique de manipulation sectaire, bien huilée, commence par une phase de séduction et par une forme d’empathie : au hasard d’une rencontre, quelqu’un va s’intéresser à Martin et affirmer qu’il le comprend et vante ses qualités. Non seulement ce dernier trouve une écoute qui le touche mais en plus cet(te) inconnu(e) lui parle d’un groupe d’amis "très sympas" avec qui il trouvera autant d’écoutes. À cette phase de séduction succède bientôt une phase d’initiation à des connaissances ésotériques sensés déconnectés le jeune homme de son environnement. À partir de là, la manipulation opère à plein : l’initié cherche à faire pleinement partie d’une petite société indépendante gravitant autour d’un gourou autoproclamé. En outre, ajoute Catherine Armessen, les sectes ne sont pas des entités homogènes : autour d’un groupuscule de disciples irréductibles gravitent des sympathisants bienveillants et qui peuvent trouver simplement sympathiques le groupe d’illuminés qu’ils ne qualifient pas (encore ?) de secte.

À la remarque d’un participant partisan de laisser à tout à chacun la libre pratique d’un culte quel qu’il soit, Catherine Armessen répond par une constatation imparable : l’extrême dangerosité des sectes, dangerosité psychologique (la manipulation aliénante) voire physique (l’exemple de l’interdiction des transfusions sanguines, chez les Témoins de Jéhovah, par exemple). À cela s’ajoute les motivations financières de ces sociétés très souvent uniquement mues par l’appât du gain. L’auteur ajoute que n’importe qui, quel que soit son âge, son sexe, son niveau d’études et sa profession peut être manipulé par les sectes, bien que celles-ci se "méfient" des profils cartésiens (les médecins par exemple), plus réticents adhérer aux doctrines abracadabrantesques (sur la fin du monde par exemple). Bruno s’étonne à ce sujet que dans le roman Manipulation, Catherine Armessen met en scène deux adolescentes étudiantes en médecine. Catherine Armessen que ce ne sont que des étudiantes ("Cela ne compte pas..."). Par contre, cette dernière convient que le jour où elle a croisé sur un plateau de télévision un important cadre de la secte des Raëliens, elle a pris une grande attention à ce qu’elle disait afin de ne pas être prise au piège.

Suivant l’exemple de Martin, la sortie d’une secte ne se fait que lentement et grâce à l’initiative de l’adhérent. Si Martin veut échapper à l’emprise du gourou, il devra être entouré d’amis, de proches, de sa famille, et avec le soutien d’associations spécialisées contre les sectes (UNADFI). Cette expérience, pour fugace qu’elle soit, va le laisser en tout cas marqué à jamais.

Ainsi se termine cette séance passionnante et vivante, enrichie de nombreuses interventions du public.

Claire et Bruno remercient Catherine Armessen pour son intervention brillante.

Ils donnent rendez-vous pour le dernier café philosophique de la saison le vendredi 22 juillet. Le sujet choisi par les participants aura pour titre : "Qui dit "jeune" dit-il forcément "con" ?

Lien permanent Catégories : => Saison 2, Comptes-rendus des débats, [15] "Pensées sectaires : Où s'arrête ma liberté?" Imprimer 0 commentaire Pin it!

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