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  • Arendt : Mensonge et violence

    Il existe une différence essentielle entre le criminel qui prend soin de dissimuler à tous les regards ses actes répréhensibles et celui qui fait acte de désobéissance civile en défiant les autorités et s’institue lui-même porteur d’un autre droit. Cette distinction nécessaire entre une violation ouverte et publique de la loi et une violation clandestine a un tel caractère d’évidence que le refus d’en tenir compte ne saurait provenir que d’un préjugé allié à de la mauvaise volonté. Reconnue désormais par tous les auteurs sérieux qui abordent ce sujet, cette distinction est naturellement invoquée comme un argument primordial par tous ceux qui s’efforcent de faire reconnaître que la désobéissance civile n’est pas incompatible avec les lois et les institutions publiques... Le délinquant de droit commun, par contre, même s’il appartient à une organisation criminelle, agit uniquement dans son propre intérêt ; il refuse de s’incliner devant la volonté du groupe et ne cédera qu’à la violence des services chargés d’imposer le respect de la loi. Celui qui fait acte de désobéissance civile, tout en étant généralement en désaccord avec une majorité, agit au nom et en faveur d’un groupe particulier. Il lance un défi aux lois et à l’autorité établie à partir d’un désaccord fondamental, et non parce qu’il entend personnellement bénéficier d’un passe-droit.

    Hannah Arendt, Du mensonge à la violence (1972)

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  • Kant : Mentir par humanité ?

    Si tu as, par exemple, empêché d'agir par un mensonge quelqu'un qui se trouvait avoir alors des intentions meurtrières, tu es responsable d'un point de vue juridique de toutes les conséquences qui pourraient en résulter. Mais si tu t'en es tenu strictement à la vérité, la justice publique ne peut rien te faire quelles que soient les conséquences imprévues. Il peut toutefois se produire qu'après que tu as honnêtement répondu oui au meurtrier qui te demandait si celui qu'il voulait tuer était chez toi, celui-ci soit cependant sorti sans être remarqué et qu'ainsi il ait échappé au meurtrier, que le crime alors n'ait pas eu lieu; mais supposons que tu aies menti et dit qu'il n'était pas chez toi, et qu'il soit réellement sorti (bien qu'à ton insu); si le meurtrier le rencontrant en train de sortir, accomplissait son crime, tu peux alors être à bon droit accusé d'être la cause de sa mort... Par conséquent celui qui ment, quelque bien intentionné qu'il puisse être, doit répondre des conséquences de son mensonge (...) et en payer le prix, quel que soit leur caractère imprévisible. Car dire la vérité constitue un devoir qui doit être considéré comme la base de tous les devoirs qui sont à fonder sur un contrat, et dont la loi, si on y tolère ne serait-ce que la plus petite exception, est rendue chancelante et vaine.

    Emmanuel Kant, Sur un prétendu droit de mentir par humanité (1797)

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