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Alain : Petits bonheurs et victoires

Il y a des bonheurs solitaires qui portent toujours les mêmes marques, action, travail, victoire ; ainsi le bonheur de l’avare ou du collectionneur, qui, du reste, se ressemblent beaucoup. D’où vient que l’avarice est prise pour un vice, surtout si l’avare en vient à s’attacher aux vieilles pièces d’or, tandis que l’on admire plutôt celui qui met en vitrine des émaux, ou des ivoires, ou des peintures, ou des livres rares ? On se moque de l’avare qui ne veut pas changer son or pour d’autres plaisirs, alors qu’il y a des collectionneurs de livres qui n’y lisent jamais, de peur de les salir. Dans le vrai, ces bonheurs-là, comme tous les bonheurs, sont impossibles à goûter de loin ; c’est le collectionneur qui aime les timbres-poste, et je n’y comprends rien. De même c’est le boxeur qui aime la boxe et le chasseur qui aime la chasse, et le politique qui aime la politique. C’est dans l’action libre qu’on est heureux ; c’est par la règle que l’on se donne qu’on est heureux ; par la discipline acceptée en un mot, soit au jeu de football, soit à l’étude des sciences. Et ces obligations, vues de loin, ne plaisent pas, mais au contraire déplaisent. Le bonheur est une récompense qui vient à ceux qui ne l’ont pas cherchée.

Alain, Propos sur le Bonheur (1925)

Photo : Pexels - Andrea Piacquadio

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