Café philo décembre 100e
Fitzgerald : Les festins chez Gatsby Le Magnifique
Tous les vendredis, cinq grandes caisses d’oranges et de citrons arrivaient de chez un fruitier de New-York – tous les lundis, les mêmes oranges et les mêmes citrons sortaient par la porte de service en une pyramide de moitiés vidées de pulpe. Dans la cuisine il y avait un appareil capable d’extraire le jus de deux cents oranges en une demi-heure, mais il fallait qu’un valet appuyât deux cents fois de suite sur un petit bouton avec le pouce.
Une fois au moins par quinzaine, un détachement de décorateurs arrivait avec plusieurs centaines de mètres de toile et une quantité de lumières de couleur suffisante pour transformer le parc de Gatsby en un gigantesque arbre de Noël. Sur des tables, garnies de hors d’œuvre luisants, s’entassaient des jambons épicés et cuits au four parmi des salades multicolores comme des manteaux d’arlequin, des pâtés de porc et des dindes qu’un sortilège avait teintes de brun doré. Dans la galerie principale, on installait un bar muni de son appuie-pied en cuivre et garni de gin, de liqueurs et de cordiaux depuis si longtemps oubliés que la plupart des invités étaient trop jeunes pour les distinguer les uns des autres.
Francis Scott Fitzgerald, Gatsby Le Magnifique (1925)