Rousseau : Indépendance et liberté (25/09/2025)
On a beau vouloir confondre l’indépendance et la liberté, ces deux choses sont si différentes que même elles s’excluent mutuellement.
Quand chacun fait ce qu’il lui plaît, on fait souvent ce qui déplaît à d’autres, et cela ne s’appelle pas un état libre. La liberté consiste moins à faire sa volonté qu’à n’être pas soumis à celle d’autrui ; elle consiste encore à ne pas soumettre la volonté d’autrui à la nôtre. Quiconque est maître ne peut être libre, et régner c’est obéir. Vos Magistrats savent cela mieux que personne, eux qui comme Othon n’omettent rien de servile pour commander. Je ne connais de volonté vraiment libre que celle à laquelle nul n’a d’opposer de résistance. Dans la liberté commune nul n’a le droit de faire ce que la liberté d’un autre lui interdit, et la vraie liberté n’est jamais destructive d’elle-même.
Ainsi la sans la justice est une véritable contradiction ; car comme qu'on s’y prenne tout gêne dans l’exécution d’une volonté désordonnée.
Il n’y a donc point de liberté sans Lois, ni où quelque un est au-dessus des Lois : dans l’état même de nature l’homme n’est libre qu’à la faveur de la Lois naturelle qui commande à tous. Un peuple libre obéit, mais il ne sert pas ; il a des chefs et non pas des maîtres ; il obéit aux Lois, mais il n’obéit qu’aux Lois et c’est par la force des Lois qu’il n’obéit pas aux hommes. (…) Un peuple est libre, quelque forme qu’ai son Gouvernement, quand dans celui qui gouverne il ne voit point l’homme, mais l’organe de la loi.
Jean-Jacques Rousseau, Lettres écrites de la Montagne (1762)
Photo : Pexels - Tobias Bjørkli
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