Anne Franck : Journal (15/12/2022)

81VxcNQmS9L.jpgDe toute évidence, le couple à la lampe de poche avait prévenu la police ; c’était le dimanche soir, le soir du jour de Pâques, le lendemain personne au bureau, donc personne ne pouvait rien faire avant mardi matin. Imagine-toi deux nuits et un jour à vivre dans l’angoisse ! Nous ne pensions à rien, restions assis là dans l’obscurité totale car Madame, de peur, avait complètement dévissé l’ampoule, les voix chuchotaient, à chaque craquement on entendait des « chut, chut ». Dix heures et demie, onze heures passèrent, pas un son, chacun leur tour, Papa et Van Daan vinrent nous voir. Puis à onze heures et quart, des bruits en bas. Chez nous, on entendait distinctement respirer toute la famille, pour le reste nous étions immobiles. Des pas dans la maison, dans le bureau privé, dans la cuisine, puis…dans notre escalier, tout le monde retenait son souffle, huit cœurs battaient à tout rompre, des pas dans notre escalier, puis des secousses à notre porte-bibliothèque. Moment indescriptible : « Nous sommes perdus ! » dis-je, et je nous voyais tous les huit, emmenés la nuit même par la Gestapo. Secousses à la porte-bibliothèque, à deux reprises, puis une boîte tomba, les pas s’éloignèrent, pour l’instant nous étions sauvés ! Un frisson nous parcourut tous, sans en distinguer la provenance j’entendis des claquements de dents, personne ne disait plus rien, nous sommes restés assis ainsi jusqu’à onze heures et demie.

Anne Franck, Journal (1942-1944)

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