Alena Mornstajnova, Hana (21/09/2022)
Lorsque mes parents et mes frère et sœur s'en sont allés dans l'autre monde en oubliant de m'emmener avec eux, j'étais encore trop petite pour poser des questions, et le mystère que cachaient le chagrin et la bizarrerie de tante Hana ne s'est révélé à moi que lentement, progressivement, au cours de ces années de vie commune, comme le fond d'une rivière asséchée.
"Sans eux, tu ne serais pas là", avait coutume de dire ma mère sur un ton de reproche tandis que j'attendais, l'air ennuyé, qu'elle ait fini de nettoyer les tombes au cimetière et de raconter les dernières nouvelles aux défunts. Mais si j'avais alors fait un peu plus attention et si j'avais posé quelques questions sur les destinées que recouvraient les noms gravés en lettres dorées sur les pierres tombales, il me serait beaucoup plus facile, à présent, de recomposer à l'aide de milliers de souvenirs fragmentaires les événements ayant précédé ma naissance.
Alena Mornstajnova, Hana, éd. Bleu et Jaune (2022)
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